• Jean-Charles-Léonard Simonde de Sismondi to August Wilhelm von Schlegel

  • Place of Dispatch: Genf · Place of Destination: Auxerre · Date: 24.06.1806
Edition Status: Single collated printed full text with registry labelling
    Metadata Concerning Header
  • Sender: Jean-Charles-Léonard Simonde de Sismondi
  • Recipient: August Wilhelm von Schlegel
  • Place of Dispatch: Genf
  • Place of Destination: Auxerre
  • Date: 24.06.1806
  • Notations: Empfangsort erschlossen.
    Printed Text
  • Provider: Dresden, Sächsische Landesbibliothek - Staats- und Universitätsbibliothek
  • OAI Id: 335976727
  • Bibliography: Krisenjahre der Frühromantik. Briefe aus dem Schlegelkreis. Hg. v. Josef Körner. Bd. 1. Der Texte erste Hälfte. 1791‒1808. Bern u.a. ²1969, S. 348‒349.
  • Incipit: „[1] Jʼavois beaucoup désiré de recevoir une lettre de vous mon cher ami, et la votre mʼa fait un grand plaisir, [...]“
    Manuscript
  • Provider: Dresden, Sächsische Landesbibliothek - Staats- und Universitätsbibliothek
  • OAI Id: APP2712-Bd-6
  • Classification Number: Mscr.Dresd.App.2712,B,21,83
  • Number of Pages: 4 S. auf Doppelbl., hs.
  • Format: 20,1 x 12,6 cm
    Language
  • French
[1] Jʼavois beaucoup désiré de recevoir une lettre de vous mon cher ami, et la votre mʼa fait un grand plaisir, elle a commencé à me tranquilliser sur Me de Stael, et celle que je reçois aujourdʼhui dʼelle achève de me la faire voir dans un état plus calme. Je lui raconte comment je me trouve prisonnier ici, et dans lʼimpossibilité dʼaller vous voir comme jʼen avois toujours fait le projet, mais jʼaime à croire cependant que notre séparation ne sera pas longue, et quʼaprès ce séjour à Thombières dont vous me parlez, vous reviendrez à Copet passer lʼautomne. Plût à Dieu quʼavec votre dégout pour ce que vous avez vu, et mon aversion pour ce que je nʼai pas voulu voir, nous pussions acquérir un peu dʼinfluence sur lʼesprit de notre amie, et la faire renoncer à cette passion si malheureuse pour Paris. Dans le fait elle accuse une seule circonstance, tandis quʼelle devroit sʼenprendre à un malheur universel, ce nʼest pas son exil qui la laisse isolée dans le monde, cʼest que tout est triste tout est désastreux dans lʼépoque où nous vivons, et quand elle nʼauroit pas ce malheur privé [2] elle en auroit assez du malheur public, pour souffrir tout autant quʼelle souffre et que nous souffrons tous.
Le portrait étoit déja achevé jeudi lors que je reçus votre lettre, il étoit même encadré et couvert dʼun verre, mais je me trouvai bien embarrassé quand Massot me dit quʼhors de ce cadre et dʼune boete qui le couvriroit il ne pouvoit en répondre, et quʼil nʼy avoit aucun moyen de hasarder un dessein au crayon, entre des cartons, ou dʼaucune manière qui lʼexposât au plus léger attouchement. Très heureusement il sʼest présenté une occasion sûre, un Mr Hermes, botaniste de Berlin que je connois, voyageant avec une Dame , est arrivé hier et repart après demain après avoir achevé un tour de Suisse, il sera au plus tard dans un mois ou cinq semaines à Berlin, et il a bien voulu se charger de cette boëte que je lui ai remise ce matin, et qui sʼest trouvée encore beaucoup plus grande que je nʼavois compté. Vous pouvez lʼécrire à Mad. Unger, je lui écrirai de mon côté, quand je me serai fait donner plus exactement le nom et lʼadresse de cette Dame à Berlin.
Je continue mon étude de lʼAllemand, mais vos règles et [3] vos conseils me manquent prodigieusement, et je le prononce sans doute fort mal, je lis beaucoup cependant, et sans comprendre très bien ce que je lis, je puis aller en avant assez vite, comme fait Me de Stael. Je lis à présent le théatre de Lessing dont je ne suis pas trés enchanté, peut-être nʼest-ce point les meilleures pièces. Mais Guillaume Tell de Schiller que jʼai commencé lʼautre jour avec les [Dam]es Brun mʼa fait la plus profonde impression.
Jʼai refait tout mon chapitre sur la religion, si ce nʼest dans votre esprit, du moins dʼune manière conforme à vos conseils, jʼai senti comme vous que tout le début, ce long morceau de controverse, étoit un hors dʼœuvre, et je lʼai absolument retranché. Jʼai mis à la place des recherches beaucoup plus exactes sur le Gouvernement de Rome du cinquième au dixième Siècle, ensorte que ce qui vous rebuttoit vous intéressera jʼespère à présent. Ce nʼest pas que je sois devenu plus catholique, mais jʼaurai assez des ennemis politiques que je me susciterai, sans aller forcer à se déclarer contre moi des religieux avec qui je nʼai rien à faire. Jʼespère quʼavant lʼimpression je vous [4] reverrai encore, et que vous me donnerez encore des conseils. – Et vous profitez vous du moins du repos et de lʼennui dʼAuxerre pour travailler? Je crains bien que non. – Adieu. Recevez lʼassurance de tout mon attachement.
Genève 24 Juin 1806.
[1] Jʼavois beaucoup désiré de recevoir une lettre de vous mon cher ami, et la votre mʼa fait un grand plaisir, elle a commencé à me tranquilliser sur Me de Stael, et celle que je reçois aujourdʼhui dʼelle achève de me la faire voir dans un état plus calme. Je lui raconte comment je me trouve prisonnier ici, et dans lʼimpossibilité dʼaller vous voir comme jʼen avois toujours fait le projet, mais jʼaime à croire cependant que notre séparation ne sera pas longue, et quʼaprès ce séjour à Thombières dont vous me parlez, vous reviendrez à Copet passer lʼautomne. Plût à Dieu quʼavec votre dégout pour ce que vous avez vu, et mon aversion pour ce que je nʼai pas voulu voir, nous pussions acquérir un peu dʼinfluence sur lʼesprit de notre amie, et la faire renoncer à cette passion si malheureuse pour Paris. Dans le fait elle accuse une seule circonstance, tandis quʼelle devroit sʼenprendre à un malheur universel, ce nʼest pas son exil qui la laisse isolée dans le monde, cʼest que tout est triste tout est désastreux dans lʼépoque où nous vivons, et quand elle nʼauroit pas ce malheur privé [2] elle en auroit assez du malheur public, pour souffrir tout autant quʼelle souffre et que nous souffrons tous.
Le portrait étoit déja achevé jeudi lors que je reçus votre lettre, il étoit même encadré et couvert dʼun verre, mais je me trouvai bien embarrassé quand Massot me dit quʼhors de ce cadre et dʼune boete qui le couvriroit il ne pouvoit en répondre, et quʼil nʼy avoit aucun moyen de hasarder un dessein au crayon, entre des cartons, ou dʼaucune manière qui lʼexposât au plus léger attouchement. Très heureusement il sʼest présenté une occasion sûre, un Mr Hermes, botaniste de Berlin que je connois, voyageant avec une Dame , est arrivé hier et repart après demain après avoir achevé un tour de Suisse, il sera au plus tard dans un mois ou cinq semaines à Berlin, et il a bien voulu se charger de cette boëte que je lui ai remise ce matin, et qui sʼest trouvée encore beaucoup plus grande que je nʼavois compté. Vous pouvez lʼécrire à Mad. Unger, je lui écrirai de mon côté, quand je me serai fait donner plus exactement le nom et lʼadresse de cette Dame à Berlin.
Je continue mon étude de lʼAllemand, mais vos règles et [3] vos conseils me manquent prodigieusement, et je le prononce sans doute fort mal, je lis beaucoup cependant, et sans comprendre très bien ce que je lis, je puis aller en avant assez vite, comme fait Me de Stael. Je lis à présent le théatre de Lessing dont je ne suis pas trés enchanté, peut-être nʼest-ce point les meilleures pièces. Mais Guillaume Tell de Schiller que jʼai commencé lʼautre jour avec les [Dam]es Brun mʼa fait la plus profonde impression.
Jʼai refait tout mon chapitre sur la religion, si ce nʼest dans votre esprit, du moins dʼune manière conforme à vos conseils, jʼai senti comme vous que tout le début, ce long morceau de controverse, étoit un hors dʼœuvre, et je lʼai absolument retranché. Jʼai mis à la place des recherches beaucoup plus exactes sur le Gouvernement de Rome du cinquième au dixième Siècle, ensorte que ce qui vous rebuttoit vous intéressera jʼespère à présent. Ce nʼest pas que je sois devenu plus catholique, mais jʼaurai assez des ennemis politiques que je me susciterai, sans aller forcer à se déclarer contre moi des religieux avec qui je nʼai rien à faire. Jʼespère quʼavant lʼimpression je vous [4] reverrai encore, et que vous me donnerez encore des conseils. – Et vous profitez vous du moins du repos et de lʼennui dʼAuxerre pour travailler? Je crains bien que non. – Adieu. Recevez lʼassurance de tout mon attachement.
Genève 24 Juin 1806.
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