• August Wilhelm von Schlegel to Anne Louise Germaine de Staël-Holstein

  • Place of Dispatch: Coppet · Place of Destination: Wien · Date: 12. August [1808]
Edition Status: Single collated printed full text with registry labelling
    Metadata Concerning Header
  • Sender: August Wilhelm von Schlegel
  • Recipient: Anne Louise Germaine de Staël-Holstein
  • Place of Dispatch: Coppet
  • Place of Destination: Wien
  • Date: 12. August [1808]
  • Notations: Datum (Jahr) und Empfangsort erschlossen.
    Printed Text
  • Bibliography: Pange, Pauline de: Auguste-Guillaume Schlegel et Madame de Staël d’apres des documents inédits. Paris 1938, S. 231‒233.
  • Incipit: „Coppet ce 12 août [1808].
    Je vous remercie bien de votre lettre, chère amie, et de vos communications de Vienne. Celle de [...]“
    Language
  • French
Coppet ce 12 août [1808].
Je vous remercie bien de votre lettre, chère amie, et de vos communications de Vienne. Celle de de Carro m’a fait grand plaisir.
Voici vos chapeaux, le port coûtera au-delà de deux écus neufs, mais comme il y va de la parure et que vos ordres sont précis il n’y a pas à hésiter.
La caisse de Vienne est arrivée, elle ne contenait que peu de livres à vous et des papiers de musique. J’en ai tiré avec joye mes provisions de vieux allemand. Avec cela je braverois un long blocus sans craindre la disette.
J’ai enfin eu une seconde lettre de mon frère. Il s’étonne de ce qu’Albert insiste sur des visites à son école au moins à une lieue de là et n’en voyant pas l’utilité. Il dit qu’il a une fois pour toutes invité Albert les dimanches, qu’il a cru, d’après ce qu’Alb[ert] lui avoit dit lui-même, qu’il étoit à Baden, qu’il n’a pas répété l’invitation parce que les enfants de Madame B[ernhardi] avaient des maladies qui pouvoient se communiquer, mais qu’il vous prie de lui enjoindre de venir les dimanches chez lui, qu’il aura soin de l’occuper plus utilement qu’autre part. Il s’étoit arrangé pour aller le jour suivant à l’Ecole des Cadets. Du reste j’écrirai pas la poste prochaine à mon frère, qu’il doit aller chaque semaine une fois chez Alb[ert] non pas pour satisfaire son point d’honneur, mais pour mieux observer ce qu’il fait et tout ce qui le concerne.
Félix a pris la rougeole à peine que son frère étoit guéri d’une maladie grave; sa mère en le soignant l’a prise également, de sorte que sa maison n’a pas désempli de malades tout le tems.
Mon frère s’est beaucoup lié avec Hormayr, il fréquente journellement les archives qui lui sont ouvertes pour son étude de l’histoire autrichienne.
Je trouve que c’est une furieuse épargne de tems que de ne pas desserrer les lèvres excepté pour respirer et pour avaler le peu de nourriture qu’il faut. Mon dîner dure un quart d’heure et mon souper dix minutes. Cependant ne vous inquiétez pas sur ma solitude, croyez-moi, je suis fait pour cela. Il n’y a pas d’autre moyen pour me faire avancer dans le travail qu’une solitude complète ou une urgente nécessité. J’ai déjà revisé mon cours presqu’entier. J’avois grand peur de le regarder, croyant que j’en serois très mécontent, comme il a été écrit tant à la hâte. Mais au contraire, je n’y trouve presque rien à changer, mais seulement à ajouter. Il est vrai que ces lacunes à remplir pourroient m’engager à lire ou à relire quelques centaines de volumes d’auteurs dramatiques, cependant je peux m’arrêter làdedans à un point nommé, et mon manuscrit sera toujours prêt pour l’impression. Mais malheureusement je n’en suis pas encore là. Le libraire de Vienne se rétracte, il prétend que son offre a été calculée sur le papier monnaye. Je ne serai pas assez fou pour vendre mon manuscrit au tiers du prix. Je fais donc des démarches auprès d’autres libraires, mais tout cela prend du tems et mon frère pense qu’il seroit fort avantageux qu’à mon arrivée à Vienne mon cours fût déjà imprimé et répandu.
En effet, je pense que cela fera une lecture assez amusante; cependant cela me donne peu de satisfaction. C’est dans de tout autres genres que je voudrois me faire connoître.
Un homme de lettres de St-Gall m’écrit qu’il a vu mon frère à Vienne et il est tout enchanté de sa connoissance.
Frédéric me presse beaucoup de vous faire lire son extrait de Stollberg. Lui manderai-je avec quelle injuste défaveur vous avez reçu cet excellent morceau?
Il faut pourtant qu’à votre retour je vous donne des éclaircissements sur cet article de gazette, que vous avez attribué à mon frère même: comme ce que lui et sa femme m’écrivent là-dessus s’accorde parfaitement, il n’y a pas lieu à douter.
Je vous envoye un article du Moniteur inséré dans les deux Gazettes de hier, qui est fort remarquable, peut-être ne trouvez-vous pas tout de suite à Berne les papiers françois. Qu’est-ce qu’il en faut conclure? Que la guerre est éloignée en effet, parce qu’elle est impossible à faire en ce moment-ci, ou que ces bruits font un effet défavorable en France, ayant la guerre en Espagne sur les bras? Ou veut-on seulement endormir l’Autriche et l’empêcher de se mettre en position? Il paroît que les Princes de la confédération avoient pris l’alarme. Si le Grand Duché de Berg est réuni, voilà du moins un nouveau motif pour eux pour prévoir le même sort s’ils ne sont pas aveugles.
Quant aux articles de paix entre l’Angleterre et les Espagnols, vous les aurez vus dans les journaux suisses. J’en ai été ravi, ce M. Canning paroît vraiment un homme admirable.
Si vous voyez Mlle Mendelsohn, dites-lui qu’elle pourroit me rendre un grand service en cherchant à Berne chez quelque bouquiniste le Strättlinger Chronik, qui doit contenir beaucoup de récits merveilleux. J’ai mis sur la caisse des chapeaux une adresse à votre nom, il faut la faire prendre à la poste.
Adieu, chère amie.
Mille compliments à toute votre société.
Coppet ce 12 août [1808].
Je vous remercie bien de votre lettre, chère amie, et de vos communications de Vienne. Celle de de Carro m’a fait grand plaisir.
Voici vos chapeaux, le port coûtera au-delà de deux écus neufs, mais comme il y va de la parure et que vos ordres sont précis il n’y a pas à hésiter.
La caisse de Vienne est arrivée, elle ne contenait que peu de livres à vous et des papiers de musique. J’en ai tiré avec joye mes provisions de vieux allemand. Avec cela je braverois un long blocus sans craindre la disette.
J’ai enfin eu une seconde lettre de mon frère. Il s’étonne de ce qu’Albert insiste sur des visites à son école au moins à une lieue de là et n’en voyant pas l’utilité. Il dit qu’il a une fois pour toutes invité Albert les dimanches, qu’il a cru, d’après ce qu’Alb[ert] lui avoit dit lui-même, qu’il étoit à Baden, qu’il n’a pas répété l’invitation parce que les enfants de Madame B[ernhardi] avaient des maladies qui pouvoient se communiquer, mais qu’il vous prie de lui enjoindre de venir les dimanches chez lui, qu’il aura soin de l’occuper plus utilement qu’autre part. Il s’étoit arrangé pour aller le jour suivant à l’Ecole des Cadets. Du reste j’écrirai pas la poste prochaine à mon frère, qu’il doit aller chaque semaine une fois chez Alb[ert] non pas pour satisfaire son point d’honneur, mais pour mieux observer ce qu’il fait et tout ce qui le concerne.
Félix a pris la rougeole à peine que son frère étoit guéri d’une maladie grave; sa mère en le soignant l’a prise également, de sorte que sa maison n’a pas désempli de malades tout le tems.
Mon frère s’est beaucoup lié avec Hormayr, il fréquente journellement les archives qui lui sont ouvertes pour son étude de l’histoire autrichienne.
Je trouve que c’est une furieuse épargne de tems que de ne pas desserrer les lèvres excepté pour respirer et pour avaler le peu de nourriture qu’il faut. Mon dîner dure un quart d’heure et mon souper dix minutes. Cependant ne vous inquiétez pas sur ma solitude, croyez-moi, je suis fait pour cela. Il n’y a pas d’autre moyen pour me faire avancer dans le travail qu’une solitude complète ou une urgente nécessité. J’ai déjà revisé mon cours presqu’entier. J’avois grand peur de le regarder, croyant que j’en serois très mécontent, comme il a été écrit tant à la hâte. Mais au contraire, je n’y trouve presque rien à changer, mais seulement à ajouter. Il est vrai que ces lacunes à remplir pourroient m’engager à lire ou à relire quelques centaines de volumes d’auteurs dramatiques, cependant je peux m’arrêter làdedans à un point nommé, et mon manuscrit sera toujours prêt pour l’impression. Mais malheureusement je n’en suis pas encore là. Le libraire de Vienne se rétracte, il prétend que son offre a été calculée sur le papier monnaye. Je ne serai pas assez fou pour vendre mon manuscrit au tiers du prix. Je fais donc des démarches auprès d’autres libraires, mais tout cela prend du tems et mon frère pense qu’il seroit fort avantageux qu’à mon arrivée à Vienne mon cours fût déjà imprimé et répandu.
En effet, je pense que cela fera une lecture assez amusante; cependant cela me donne peu de satisfaction. C’est dans de tout autres genres que je voudrois me faire connoître.
Un homme de lettres de St-Gall m’écrit qu’il a vu mon frère à Vienne et il est tout enchanté de sa connoissance.
Frédéric me presse beaucoup de vous faire lire son extrait de Stollberg. Lui manderai-je avec quelle injuste défaveur vous avez reçu cet excellent morceau?
Il faut pourtant qu’à votre retour je vous donne des éclaircissements sur cet article de gazette, que vous avez attribué à mon frère même: comme ce que lui et sa femme m’écrivent là-dessus s’accorde parfaitement, il n’y a pas lieu à douter.
Je vous envoye un article du Moniteur inséré dans les deux Gazettes de hier, qui est fort remarquable, peut-être ne trouvez-vous pas tout de suite à Berne les papiers françois. Qu’est-ce qu’il en faut conclure? Que la guerre est éloignée en effet, parce qu’elle est impossible à faire en ce moment-ci, ou que ces bruits font un effet défavorable en France, ayant la guerre en Espagne sur les bras? Ou veut-on seulement endormir l’Autriche et l’empêcher de se mettre en position? Il paroît que les Princes de la confédération avoient pris l’alarme. Si le Grand Duché de Berg est réuni, voilà du moins un nouveau motif pour eux pour prévoir le même sort s’ils ne sont pas aveugles.
Quant aux articles de paix entre l’Angleterre et les Espagnols, vous les aurez vus dans les journaux suisses. J’en ai été ravi, ce M. Canning paroît vraiment un homme admirable.
Si vous voyez Mlle Mendelsohn, dites-lui qu’elle pourroit me rendre un grand service en cherchant à Berne chez quelque bouquiniste le Strättlinger Chronik, qui doit contenir beaucoup de récits merveilleux. J’ai mis sur la caisse des chapeaux une adresse à votre nom, il faut la faire prendre à la poste.
Adieu, chère amie.
Mille compliments à toute votre société.
· Übersetzung , 12. August [1808]
· Pange, Pauline de: August Wilhelm Schlegel und Frau von Staël. Eine schicksalhafte Begegnung. Nach unveröffentlichten Briefen erzählt von Pauline Gräfin de Pange. Dt. Ausg. von Willy Grabert. Hamburg 1940, S. 173–175.
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