• August Wilhelm von Schlegel to Anne Louise Germaine de Staël-Holstein

  • Place of Dispatch: Bern · Place of Destination: Genf · Date: 05.01.1812
Edition Status: Single collated printed full text with registry labelling
    Metadata Concerning Header
  • Sender: August Wilhelm von Schlegel
  • Recipient: Anne Louise Germaine de Staël-Holstein
  • Place of Dispatch: Bern
  • Place of Destination: Genf
  • Date: 05.01.1812
  • Notations: Absendeort erschlossen.
    Printed Text
  • Bibliography: Pange, Pauline de: Auguste-Guillaume Schlegel et Madame de Staël d’apres des documents inédits. Paris 1938, S. 342‒343.
  • Incipit: „Dimanche, ce 5 janvier 1812.
    Je suis bien aise, chère amie, d’avoir une longue lettre de vous, vous ne parlez pas de [...]“
    Language
  • French
Dimanche, ce 5 janvier 1812.
Je suis bien aise, chère amie, davoir une longue lettre de vous, vous ne parlez pas de votre santé, cela me fait espérer quau moins votre indisposition accessoire a cessé.
Sans doute la nouvelle concernant M. de St. P[riest] mérite la plus grande attention. Je le plains, mais je voudrois pour sa dignité quil eût moins fait pour conserver ce que pourtant il falloit perdre. Je ne doute aucunement que la correspondance avec ses fils ne soit la véritable cause de cette mesure, on craint le coup d’œil dun ancien diplomate sur les circonstances intérieures et les renseignements quil pourroit envoyer dans le Nord. Peut-être a-t-il eu limprudence de mettre ses lettres à un bureau de poste fr[ançais], et den recevoir directement. Du reste cela me paroît un symptôme dune guerre prochaine.
Javois bien prévu la stérilité inévitable de mes lettres – on ne sait rien ici et lon ne dit rien. M. Mousson est à Basle; M. de Lichtenthurm qui, dordinaire, est assez bien informé, est encore absent. On prétend que la rechute du change autrichien na aucun rapport avec le crédit des finances ni avec les circonstances politiques, mais provient uniquement de lactivité du commerce du Levant qui demande de grosses sommes en argent comptant. On prétend quon manque de blé en Fr[ance] et que le gouvernement a permis limportation des denrées coloniales, pourvu que les navires anglois ayent la moitié de leur charge en blés.
Je nai pas encore vu M. de Falk. Je suis encore tombé avec ma visite comme la première fois chez M. de Freudenreich, dans un grand dîner quil donnoit aux députés – il paroît que cest là la partie la plus essentielle des négociations. On se flatte que pour le canton du Tessin on sera quitte pour la cession dun petit district – laffaire des troupes auxiliaires sera probablement réglée de façon à fournir 3000 recrues par an.
Lhistoire infâme de Becker nest que trop vraie – le gazettier dici en a eu la nouvelle – cest un avis pour lui.
Jai eu beaucoup de plaisir à apprendre que le Cupidon Sarmate lance en vain les flèches de ses regards affables à V[ienne]. Cest une preuve de ce que je vous ai dit sur la stabilité dune opinion fort prononcée dans cette ville.
Jai donné des commissions de tous les côtés pour avoir le livre de Gœthe et je laurai certainement sous peu. En attendant on men a prêté un exemplaire – cela mamuse beaucoup mais je ne sais pas si cela aura pour vous le même intérêt. Cest une peinture du monde extérieur, tel quil se présente à lenfance, peinture faite avec beaucoup de clarté, de sérénité et délégance – mais il y a peu dintime – limagination enfantine dont il retrace les souvenirs est aussi toute tournée au dehors. Ensuite il y a des scènes historiques de lAllemagne plus curieuses pour moi que pour vous. Il est bizarre que lhomme qui sannonce comme cela soit devenu dans sa jeunesse le héros de la sensibilité mélancolique de notre tems, et je suis en suspens pour voir comment il tournera à cela.
Je remercie bien Auguste de ses aimables lignes, et je lui écrirai par le courrier prochain. Ses contre-ordres pour ne pas demander ici les extraits de la chancellerie arrivent trop tard, M. de Freudenreich me les renvoye dans ce moment avec le billet ci-joint. Ce nest quune petite dépense, il ny aura pas de mal à avoir des copies doubles.
Je ne sais pas qui peut être informé à Genève de mes oublis ou de mes réminiscences. Je vais un peu plus dans la société quà G[enève] parce que je nen ai pas chez moi. Les soirées dici sont sans prétention, elles ont beaucoup plus lair de petite ville, mais en revanche il y a moins de gêne – on vous arrange toujours la partie avec la personne dont on paroît le plus occupé, et ensuite on la reconduit chez elle – cest la règle.
Noubliez pas de témoigner à Mlle Fanny et à ses parents lintérêt que je prends à ce qui les concerne. Je me réjouis de ce quelle sétablit à C.; cette ville deviendra célèbre pour la beauté des femmes.
Comptez dans chaque instant sur moi, chère amie, comme si jétois à vos côtés et ne vous laissez rien mettre dans lesprit sur moi.
Dimanche, ce 5 janvier 1812.
Je suis bien aise, chère amie, davoir une longue lettre de vous, vous ne parlez pas de votre santé, cela me fait espérer quau moins votre indisposition accessoire a cessé.
Sans doute la nouvelle concernant M. de St. P[riest] mérite la plus grande attention. Je le plains, mais je voudrois pour sa dignité quil eût moins fait pour conserver ce que pourtant il falloit perdre. Je ne doute aucunement que la correspondance avec ses fils ne soit la véritable cause de cette mesure, on craint le coup d’œil dun ancien diplomate sur les circonstances intérieures et les renseignements quil pourroit envoyer dans le Nord. Peut-être a-t-il eu limprudence de mettre ses lettres à un bureau de poste fr[ançais], et den recevoir directement. Du reste cela me paroît un symptôme dune guerre prochaine.
Javois bien prévu la stérilité inévitable de mes lettres – on ne sait rien ici et lon ne dit rien. M. Mousson est à Basle; M. de Lichtenthurm qui, dordinaire, est assez bien informé, est encore absent. On prétend que la rechute du change autrichien na aucun rapport avec le crédit des finances ni avec les circonstances politiques, mais provient uniquement de lactivité du commerce du Levant qui demande de grosses sommes en argent comptant. On prétend quon manque de blé en Fr[ance] et que le gouvernement a permis limportation des denrées coloniales, pourvu que les navires anglois ayent la moitié de leur charge en blés.
Je nai pas encore vu M. de Falk. Je suis encore tombé avec ma visite comme la première fois chez M. de Freudenreich, dans un grand dîner quil donnoit aux députés – il paroît que cest là la partie la plus essentielle des négociations. On se flatte que pour le canton du Tessin on sera quitte pour la cession dun petit district – laffaire des troupes auxiliaires sera probablement réglée de façon à fournir 3000 recrues par an.
Lhistoire infâme de Becker nest que trop vraie – le gazettier dici en a eu la nouvelle – cest un avis pour lui.
Jai eu beaucoup de plaisir à apprendre que le Cupidon Sarmate lance en vain les flèches de ses regards affables à V[ienne]. Cest une preuve de ce que je vous ai dit sur la stabilité dune opinion fort prononcée dans cette ville.
Jai donné des commissions de tous les côtés pour avoir le livre de Gœthe et je laurai certainement sous peu. En attendant on men a prêté un exemplaire – cela mamuse beaucoup mais je ne sais pas si cela aura pour vous le même intérêt. Cest une peinture du monde extérieur, tel quil se présente à lenfance, peinture faite avec beaucoup de clarté, de sérénité et délégance – mais il y a peu dintime – limagination enfantine dont il retrace les souvenirs est aussi toute tournée au dehors. Ensuite il y a des scènes historiques de lAllemagne plus curieuses pour moi que pour vous. Il est bizarre que lhomme qui sannonce comme cela soit devenu dans sa jeunesse le héros de la sensibilité mélancolique de notre tems, et je suis en suspens pour voir comment il tournera à cela.
Je remercie bien Auguste de ses aimables lignes, et je lui écrirai par le courrier prochain. Ses contre-ordres pour ne pas demander ici les extraits de la chancellerie arrivent trop tard, M. de Freudenreich me les renvoye dans ce moment avec le billet ci-joint. Ce nest quune petite dépense, il ny aura pas de mal à avoir des copies doubles.
Je ne sais pas qui peut être informé à Genève de mes oublis ou de mes réminiscences. Je vais un peu plus dans la société quà G[enève] parce que je nen ai pas chez moi. Les soirées dici sont sans prétention, elles ont beaucoup plus lair de petite ville, mais en revanche il y a moins de gêne – on vous arrange toujours la partie avec la personne dont on paroît le plus occupé, et ensuite on la reconduit chez elle – cest la règle.
Noubliez pas de témoigner à Mlle Fanny et à ses parents lintérêt que je prends à ce qui les concerne. Je me réjouis de ce quelle sétablit à C.; cette ville deviendra célèbre pour la beauté des femmes.
Comptez dans chaque instant sur moi, chère amie, comme si jétois à vos côtés et ne vous laissez rien mettre dans lesprit sur moi.
· Übersetzung , 05.01.1812
· Pange, Pauline de: August Wilhelm Schlegel und Frau von Staël. Eine schicksalhafte Begegnung. Nach unveröffentlichten Briefen erzählt von Pauline Gräfin de Pange. Dt. Ausg. von Willy Grabert. Hamburg 1940, S. 270‒272.
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