• August Wilhelm von Schlegel to Anne Louise Germaine de Staël-Holstein

  • Place of Dispatch: Stralsund · Place of Destination: Göteborg · Date: 21.06.1813
Edition Status: Single collated printed full text with registry labelling
    Metadata Concerning Header
  • Sender: August Wilhelm von Schlegel
  • Recipient: Anne Louise Germaine de Staël-Holstein
  • Place of Dispatch: Stralsund
  • Place of Destination: Göteborg
  • Date: 21.06.1813
  • Notations: Empfangsort erschlossen.
    Printed Text
  • Bibliography: Pange, Pauline de: Auguste-Guillaume Schlegel et Madame de Staël d’apres des documents inédits. Paris 1938, S. 423‒425.
  • Incipit: „Stralsund ce 21 juin 1813.
    Chère amie, j’ai reçu votre lettre du 8 et, plus tard, celles du 5 et 7. Cela [...]“
    Language
  • French
Stralsund ce 21 juin 1813.
Chère amie, j’ai reçu votre lettre du 8 et, plus tard, celles du 5 et 7. Cela fend le cœur de voir votre peur de la mer; mais j’espère que vous l’aurez passée heureusement et même sans beaucoup d’incommodités dans cette belle saison. Je vous ai supposée plus long-temps en Suède et j’ai toujours adressé chez M. Laurent, cela revient à peu près au même puisque Gothembourg est votre voye directe pour l’Angleterre.
Voici une lettre du Cte de Neipperg qui ne m’est parvenue que ce moment-ci et par conséquent a été bien longtemps en chemin; elle m’a paru ouverte et cela est bien naturel.
L’affaire d’Albert s’est appaisée, il en a été quitte beaucoup meilleur marché que je n’avois cru. Je vous ai un peu alarmé et je l’étois moi-même – la disgrâce silencieuse qui pesait sur lui les premiers jours le mettoit au désespoir, et puis je craignois qu’il ne prît le mors aux dents vis-à-vis de quelqu’un de ses camarades s’ils eussent voulu le lui faire sentir.
Je souhaitois qu’il fût mis aux arrêts pour terminer cette situation et je pensois qu’il le serait. Enfin le Pr[ince] R[oyal] l’a fait venir et l’a grondé, mais très doucement. Alb[ert] est sorti de cet entretien confondu de la bonté du Prince, et il lui est dévoue plus que jamais. L’arrestation a été changée en un petit exil dans l’Ile de Rügen où il est actuellement. Le Pr[ince] R[oyal] m’a dit hier qu’il seroit rappelé le 24. Le tort d’Albert étoit principalement de n’être pas revenu tout de suite ici, après qu’il sut le Pr[ince] R[oyal] arrivé; ensuite on devoit trouver mauvais qu’il se fût fait aide-de-camp de Tettenborn, dans le quartier général duquel il régnoit d’ailleurs un désordre extrême. Si vous écrivez à Alb[ert], parlez-lui surtout sévèrement sur le jeu – c’est une passion funeste que le Pr[ince] R[oyal] ne veut absolument pas souffrir dans son armée.
Montrichard s’est très bien conduit dans cette affaire – il a tout le temps comme moi parlé raison à Alb[ert]; du reste, il a pris son parti.
Certainement l’intérêt, que le Pr[incel R[oyal] prend à tout ce qui vous regarde, entre pour beaucoup dans la manière vraiment paternelle dont il a traité Albert. Vous auriez été touchée de l’amabilité avec laquelle il me parla là-dessus. Il m’a chargé de vous écrire sur votre fils, en attendant qu’il puisse le faire lui-même.
Nous sommes à la veille d’un message du Quartier Général; alors nous verrons si la triple entrevue aura lieu; je le souhaite de tout mon cœur. Je ne puis pas croire à la paix, elle couperait court à toutes nos espérances. Je me flatte toujours que l’apparente irrésolution de l’Autriche tient à ce que ses préparatifs n’étoient pas assez avancés – le Ministre des Finances a bataillé pendant deux mois contre un armement avant de quitter le Ministère. L’esprit du peuple en Prusse est excellent: point de paix! c’est le cri universel. On n’est pas oisif sur la rive droite du bas Elbe et j’espère qu’avant la fin de l’armistice le Pr[incel Royal] aura rangé sous ses drapeaux un nombre considérable d’Allemands. Le comte de Wallmoden est venu ici avec plusieurs généraux et officiers anglais et hanovriens. Le Général Hope nous a quitté, et vous le verrez sans doute à Londres.
Les nouvelles d’Hambourg sont affligeantes – la ville a été frappée d’une contribution de 48 millions de francs, comme amende payable dans un mois et pour laquelle tous les biens, meubles et immeubles des habitants doivent servir de gage. On avoit dit cette contribution réduite à 16 millions – mais c’est encore énorme et le premier terme n’ayant pas pu être payé, 34 notables et pères de famille ont été conduits en France comme otages.
On a colporté ces jours-ci la nouvelle d’un grand personnage, mystérieusement malade à Dresde, et l’on s’est bercé d’espérances – mais cela seroit trop commode. Vous savez que Duroc a été tué tout-à-côté de lui.
Y a-t-il une pareille infamie que l’occupation de Hambourg par les Danois? Que dira maintenant la Fée Fanfreluche? Je veux dire Mme Brun. Mon refrain est comme celui de Caton: „Praeterea censeo, Daniam esse delendam.“ Je fais un écrit dans ce moment par rapport à cela, lequel doit être bien vite achevé; cela m’empêche de vous écrire plus longuement
Un Anglois, le Col[onel] Cook, m’a assuré que vous trouveriez dans son pays la réception la plus merveilleuse – que j’y serois bien vu aussi.
Adieu, chère amie, mille amitiés.
Demandez, je vous prie, au Cte de Munster s’il a reçu ma longue lettre. Celle du Cte N[eipperg], datée de Berlin, n’a pas passé par mes mains.
A Vienne, on a placardé un appel en vers des plus véhémens à l’Emp[ereur] pour la guerre.
Stralsund ce 21 juin 1813.
Chère amie, j’ai reçu votre lettre du 8 et, plus tard, celles du 5 et 7. Cela fend le cœur de voir votre peur de la mer; mais j’espère que vous l’aurez passée heureusement et même sans beaucoup d’incommodités dans cette belle saison. Je vous ai supposée plus long-temps en Suède et j’ai toujours adressé chez M. Laurent, cela revient à peu près au même puisque Gothembourg est votre voye directe pour l’Angleterre.
Voici une lettre du Cte de Neipperg qui ne m’est parvenue que ce moment-ci et par conséquent a été bien longtemps en chemin; elle m’a paru ouverte et cela est bien naturel.
L’affaire d’Albert s’est appaisée, il en a été quitte beaucoup meilleur marché que je n’avois cru. Je vous ai un peu alarmé et je l’étois moi-même – la disgrâce silencieuse qui pesait sur lui les premiers jours le mettoit au désespoir, et puis je craignois qu’il ne prît le mors aux dents vis-à-vis de quelqu’un de ses camarades s’ils eussent voulu le lui faire sentir.
Je souhaitois qu’il fût mis aux arrêts pour terminer cette situation et je pensois qu’il le serait. Enfin le Pr[ince] R[oyal] l’a fait venir et l’a grondé, mais très doucement. Alb[ert] est sorti de cet entretien confondu de la bonté du Prince, et il lui est dévoue plus que jamais. L’arrestation a été changée en un petit exil dans l’Ile de Rügen où il est actuellement. Le Pr[ince] R[oyal] m’a dit hier qu’il seroit rappelé le 24. Le tort d’Albert étoit principalement de n’être pas revenu tout de suite ici, après qu’il sut le Pr[ince] R[oyal] arrivé; ensuite on devoit trouver mauvais qu’il se fût fait aide-de-camp de Tettenborn, dans le quartier général duquel il régnoit d’ailleurs un désordre extrême. Si vous écrivez à Alb[ert], parlez-lui surtout sévèrement sur le jeu – c’est une passion funeste que le Pr[ince] R[oyal] ne veut absolument pas souffrir dans son armée.
Montrichard s’est très bien conduit dans cette affaire – il a tout le temps comme moi parlé raison à Alb[ert]; du reste, il a pris son parti.
Certainement l’intérêt, que le Pr[incel R[oyal] prend à tout ce qui vous regarde, entre pour beaucoup dans la manière vraiment paternelle dont il a traité Albert. Vous auriez été touchée de l’amabilité avec laquelle il me parla là-dessus. Il m’a chargé de vous écrire sur votre fils, en attendant qu’il puisse le faire lui-même.
Nous sommes à la veille d’un message du Quartier Général; alors nous verrons si la triple entrevue aura lieu; je le souhaite de tout mon cœur. Je ne puis pas croire à la paix, elle couperait court à toutes nos espérances. Je me flatte toujours que l’apparente irrésolution de l’Autriche tient à ce que ses préparatifs n’étoient pas assez avancés – le Ministre des Finances a bataillé pendant deux mois contre un armement avant de quitter le Ministère. L’esprit du peuple en Prusse est excellent: point de paix! c’est le cri universel. On n’est pas oisif sur la rive droite du bas Elbe et j’espère qu’avant la fin de l’armistice le Pr[incel Royal] aura rangé sous ses drapeaux un nombre considérable d’Allemands. Le comte de Wallmoden est venu ici avec plusieurs généraux et officiers anglais et hanovriens. Le Général Hope nous a quitté, et vous le verrez sans doute à Londres.
Les nouvelles d’Hambourg sont affligeantes – la ville a été frappée d’une contribution de 48 millions de francs, comme amende payable dans un mois et pour laquelle tous les biens, meubles et immeubles des habitants doivent servir de gage. On avoit dit cette contribution réduite à 16 millions – mais c’est encore énorme et le premier terme n’ayant pas pu être payé, 34 notables et pères de famille ont été conduits en France comme otages.
On a colporté ces jours-ci la nouvelle d’un grand personnage, mystérieusement malade à Dresde, et l’on s’est bercé d’espérances – mais cela seroit trop commode. Vous savez que Duroc a été tué tout-à-côté de lui.
Y a-t-il une pareille infamie que l’occupation de Hambourg par les Danois? Que dira maintenant la Fée Fanfreluche? Je veux dire Mme Brun. Mon refrain est comme celui de Caton: „Praeterea censeo, Daniam esse delendam.“ Je fais un écrit dans ce moment par rapport à cela, lequel doit être bien vite achevé; cela m’empêche de vous écrire plus longuement
Un Anglois, le Col[onel] Cook, m’a assuré que vous trouveriez dans son pays la réception la plus merveilleuse – que j’y serois bien vu aussi.
Adieu, chère amie, mille amitiés.
Demandez, je vous prie, au Cte de Munster s’il a reçu ma longue lettre. Celle du Cte N[eipperg], datée de Berlin, n’a pas passé par mes mains.
A Vienne, on a placardé un appel en vers des plus véhémens à l’Emp[ereur] pour la guerre.
· Übersetzung , 21.06.1813
· Pange, Pauline de: August Wilhelm Schlegel und Frau von Staël. Eine schicksalhafte Begegnung. Nach unveröffentlichten Briefen erzählt von Pauline Gräfin de Pange. Dt. Ausg. von Willy Grabert. Hamburg 1940, S. 344‒346.
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