• Ximénès Doudan to August Wilhelm von Schlegel

  • Place of Dispatch: Paris · Place of Destination: Bonn · Date: 10.04.1832
Edition Status: Single collated printed full text with registry labelling
    Metadata Concerning Header
  • Sender: Ximénès Doudan
  • Recipient: August Wilhelm von Schlegel
  • Place of Dispatch: Paris
  • Place of Destination: Bonn
  • Date: 10.04.1832
  • Notations: Empfangsort erschlossen.
    Printed Text
  • Bibliography: Doudan, Ximenès: Lettres, avec une introduction par M. le Cte d’Haussonville et des notes par MM. de Sacy et Cuvillier-Fleury. Nouvelle édition. Paris: Calmann-Lévy 1879, Bd. 1, S. 22–23.
  • Weitere Drucke: Pange, Pauline de: Auguste-Guillaume Schlegel et Madame de Staël d’apres des documents inédits. Paris 1938, S. 547.
  • Incipit: „Paris, 10 avril 1832.
    J’espère, monsieur, que cette lettre vous trouvera à Lille point trop ennuyé de la quarantaine dont vous êtes [...]“
    Manuscript
  • Provider: Dresden, Sächsische Landesbibliothek - Staats- und Universitätsbibliothek
  • OAI Id: DE-1a-33442
  • Classification Number: Mscr.Dresd.e.90,XIX,Bd.6,Nr.23
  • Number of Pages: 2S. auf Doppelbl., hs. m. U. u. Adresse
  • Format: 20 x 12,7 cm
    Language
  • French
Paris, 10 avril 1832.
J’espère, monsieur, que cette lettre vous trouvera à Lille point trop ennuyé de la quarantaine dont vous êtes menacé. C’est une bonne fortune pour Lille, qui n’est pas une ville bien litteraire, que de pouvoir se vanter de vous garder trois ou quatre jours, ne fût-ce même que pour raison de quarantaine. Ce sera là, je crois, son plus grand événement dans ses fastes litteraires. Tout le monde ici a été charmé de vous savoir arrivé bien portant à Calais. Vous aves maintenant fait vos preuves contre le choléra. C’est bien à lui de respecter la gloire littéraire. Il ne parait pas tout à fait aussi doux avec les illustrations politiques. Vous aurez dejà su qu’il s’était attaqué à M. Casimir Perier. C’eût été un cruel événement si M. Perier eût succombé. Heureusement M. Broussais paraît avoir arraché cette proie au choléra. M. Perier est encore souffrant à l’heure où je vous écris, mais plutôt d’une affection à laquelle il est sujet et que cette secousse a réveillée. On n’a point d’inquiétudes graves sur lui, grâces à Dieu. Nous avons eu des scènes cruelles ces jours derniers dans les rues de Paris; cette effroyable accusation d’empoisonnement renouvelée de toutes les grandes contagions connues, a excité le peuple à d’horribles désordes. Douze ou quinze malheurex ont été massacrés comme empoisonneurs. Ce vieux limon de barbarie qui repose dans les temps tranquilles produit des monstres aux jours de crise. A présent tout est calme. La maladie fait son chemin avec vivacité. Vous entendrez citer comme attaquées du choléra des personnes qui n’ont eu réellement que des indispositions plus ou moins graves. Choléra devient le terme générique de toute maladie. Voilà, monsieur, une lettre à tremper dans le chlore et le vinaigre, il n’yest question que de peste. Heuresement tout le monde dans cette maison est bien portant. Madame de Staël est retournée à Genève. Elle est partie ce matin.
La maison est bien triste. On vous y regrette beaucoup, monsieur. Vous la ranimiez de votre esprit et de votre affection pour la famille du duc de Broglie. Je suis bien sûr qu’il ne se passera pas longtemps sans que vous revoyiez vos amis sur les bords du Rhin; vous avez laissé à tous un vif désir de vous retrouver bientôt.
J’userai certainement, monsieur, de la permission que vous voulez bien me donner de vous écrire à Bonn; j’ai trop regret aux petites excursions que vou me laissiez faire rue de Bourbon pour ne pas chercher à renouer, même de loin, ces entretiens où vous me faisiez retrouver ce que je croyais impossible à réunir, la grâce du grand siècle et l’étendue d’esprit de nos jours.
Mille et mille respects.
Paris, 10 avril 1832.
J’espère, monsieur, que cette lettre vous trouvera à Lille point trop ennuyé de la quarantaine dont vous êtes menacé. C’est une bonne fortune pour Lille, qui n’est pas une ville bien litteraire, que de pouvoir se vanter de vous garder trois ou quatre jours, ne fût-ce même que pour raison de quarantaine. Ce sera là, je crois, son plus grand événement dans ses fastes litteraires. Tout le monde ici a été charmé de vous savoir arrivé bien portant à Calais. Vous aves maintenant fait vos preuves contre le choléra. C’est bien à lui de respecter la gloire littéraire. Il ne parait pas tout à fait aussi doux avec les illustrations politiques. Vous aurez dejà su qu’il s’était attaqué à M. Casimir Perier. C’eût été un cruel événement si M. Perier eût succombé. Heureusement M. Broussais paraît avoir arraché cette proie au choléra. M. Perier est encore souffrant à l’heure où je vous écris, mais plutôt d’une affection à laquelle il est sujet et que cette secousse a réveillée. On n’a point d’inquiétudes graves sur lui, grâces à Dieu. Nous avons eu des scènes cruelles ces jours derniers dans les rues de Paris; cette effroyable accusation d’empoisonnement renouvelée de toutes les grandes contagions connues, a excité le peuple à d’horribles désordes. Douze ou quinze malheurex ont été massacrés comme empoisonneurs. Ce vieux limon de barbarie qui repose dans les temps tranquilles produit des monstres aux jours de crise. A présent tout est calme. La maladie fait son chemin avec vivacité. Vous entendrez citer comme attaquées du choléra des personnes qui n’ont eu réellement que des indispositions plus ou moins graves. Choléra devient le terme générique de toute maladie. Voilà, monsieur, une lettre à tremper dans le chlore et le vinaigre, il n’yest question que de peste. Heuresement tout le monde dans cette maison est bien portant. Madame de Staël est retournée à Genève. Elle est partie ce matin.
La maison est bien triste. On vous y regrette beaucoup, monsieur. Vous la ranimiez de votre esprit et de votre affection pour la famille du duc de Broglie. Je suis bien sûr qu’il ne se passera pas longtemps sans que vous revoyiez vos amis sur les bords du Rhin; vous avez laissé à tous un vif désir de vous retrouver bientôt.
J’userai certainement, monsieur, de la permission que vous voulez bien me donner de vous écrire à Bonn; j’ai trop regret aux petites excursions que vou me laissiez faire rue de Bourbon pour ne pas chercher à renouer, même de loin, ces entretiens où vous me faisiez retrouver ce que je croyais impossible à réunir, la grâce du grand siècle et l’étendue d’esprit de nos jours.
Mille et mille respects.
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