• Ximénès Doudan to August Wilhelm von Schlegel

  • Place of Dispatch: Gurcy-le-Châtel · Place of Destination: Bonn · Date: 15.08.1843
Edition Status: Newly transcribed and labelled; double collated
    Metadata Concerning Header
  • Sender: Ximénès Doudan
  • Recipient: August Wilhelm von Schlegel
  • Place of Dispatch: Gurcy-le-Châtel
  • Place of Destination: Bonn
  • Date: 15.08.1843
  • Notations: Empfangsort erschlossen.
    Printed Text
  • Bibliography: Doudan, Ximenès: Lettres, avec une introduction par M. le Cte d’Haussonville et des notes par MM. de Sacy et Cuvillier-Fleury. Nouvelle édition. Paris: Calmann-Lévy 1879, Bd. 2, S. 16–17.
  • Incipit: „[1] à Gurcy. le 15 Août 1843.
    Monsieur,
    Ce qu’il vous plait de nommer de la neige froide est une pluie de roses [...]“
    Manuscript
  • Provider: Dresden, Sächsische Landesbibliothek - Staats- und Universitätsbibliothek
  • OAI Id: DE-1a-33442
  • Classification Number: Mscr.Dresd.e.90,XIX,Bd.6,Nr.46
  • Number of Pages: 2S. auf Doppelbl., hs. m. U.
  • Format: 20,7 x 13,3 cm
    Language
  • French
    Editors
  • Falk, Clio
  • Golyschkin, Ruth
[1] à Gurcy. le 15 Août 1843.
Monsieur,
Ce qu’il vous plait de nommer de la neige froide est une pluie de roses brillantes; vous les avez jetées dans la direction de
Paris, et à mon grand regret, elles me sont arrivées un peu tard et par ricochet. Elles n’en avaient pas moins gardé leur premier éclat et leurs fortes épines. Je tiens toujours que vous êtes souvent très injuste pour les pauvres gens dont vous vous moquez; vous avez un pressant besoin de passer quelques mois à Paris, pour toucher au doigt votre injustice. Nous allons demander, ne vous en ai-je pas dejà informé? Votre extradition pour avoir jugé nos chambres et précédemment nos Académies avec peu d’équité; nous obtiendrons des tribunaux que vous soyez condamné, pour dommages et interêts, à passer un an avec nous et vous serez ici d’un grand secours à l’Académie Française pour la rédaction de son dictionnaire étymologique. Vous voyez que nous n’entendons pas trop mal nos affaires.
J’ai reçu exactement le cahier bleu que vous avez la bonté de me confier. J’ai été extrêmement frappé de cette lecture. J’y vois partout la marque d’un esprit énergique et pénétrant. Mais ne trouvez-vous pas que sur de tels sujets, la pensée peut aller successivement d’un extrémité à l’autre, selon le biais par lequel on regarde les choses? Le système que vous attaquez
[2] avec tant de force, ne vous a-t-il pas paru quelquefois aussi comme les linéamens un peu indistincts d’un ordre magnifique? Je ne conteste pres que rien de ce que je trouve dans les 100. pensées. Mais j’entrevois seulement que la même puissance d’esprit qui fait trouver ces arguments contre, pourrait aussi à un autre point de vue, trouver de grandes raisons pour. Vauban aurait pris Jérusalem d’assaut, mais s’il sétait jeté dans Jérusalem il aurait pu aussi rendre la place inexpugnable. La force des intelligences supérieures donne un peu de scepticisme à ceux qui les regardent développer cette force. On dirait que selon qu’elles donnent leur impression d’Orient en Occident ou d’Occident en Orient elles peuvent changer toutes les perspectives des choses. Je voudrais bien être autorisé à montrer le cahier bleu à quelques uns de vos amis. Mais je le tiens sous les sept sceaux jusqu’à nouvel ordre & j’attends la suite avec impatience.
Nous avons relu ici le
Wilhelm Meister de Goëthe. Je me suis promis de vous demander votre avis sur le fond et sur la forme. de la forme, je n’en suis juge en aucune manière. Mais pour le fond, ai-je tort de trouver cela excessivement décousu et chimérique. Ai-je tort de penser que vous avez ouvert à la littérature allemande des routes plus larges, plus droites et qui mèneraient plus loin. On n’a guères avec Goëthe le sentiment d’avoir pied sur la vérité. C’est comme un voyage en l’air où on ne sait si ce sont les objets ou la tête qui tourne.
Recevez, Monsieur, avec tous mes remerciemens, la nouvelle expression de mon tendre & respectueux dévouement.
X Doudan
[3] [leer]
[4] [leer]
[1] 26/VIII Envoi sans lettre. répondu 25 Sept.
[1] à Gurcy. le 15 Août 1843.
Monsieur,
Ce qu’il vous plait de nommer de la neige froide est une pluie de roses brillantes; vous les avez jetées dans la direction de
Paris, et à mon grand regret, elles me sont arrivées un peu tard et par ricochet. Elles n’en avaient pas moins gardé leur premier éclat et leurs fortes épines. Je tiens toujours que vous êtes souvent très injuste pour les pauvres gens dont vous vous moquez; vous avez un pressant besoin de passer quelques mois à Paris, pour toucher au doigt votre injustice. Nous allons demander, ne vous en ai-je pas dejà informé? Votre extradition pour avoir jugé nos chambres et précédemment nos Académies avec peu d’équité; nous obtiendrons des tribunaux que vous soyez condamné, pour dommages et interêts, à passer un an avec nous et vous serez ici d’un grand secours à l’Académie Française pour la rédaction de son dictionnaire étymologique. Vous voyez que nous n’entendons pas trop mal nos affaires.
J’ai reçu exactement le cahier bleu que vous avez la bonté de me confier. J’ai été extrêmement frappé de cette lecture. J’y vois partout la marque d’un esprit énergique et pénétrant. Mais ne trouvez-vous pas que sur de tels sujets, la pensée peut aller successivement d’un extrémité à l’autre, selon le biais par lequel on regarde les choses? Le système que vous attaquez
[2] avec tant de force, ne vous a-t-il pas paru quelquefois aussi comme les linéamens un peu indistincts d’un ordre magnifique? Je ne conteste pres que rien de ce que je trouve dans les 100. pensées. Mais j’entrevois seulement que la même puissance d’esprit qui fait trouver ces arguments contre, pourrait aussi à un autre point de vue, trouver de grandes raisons pour. Vauban aurait pris Jérusalem d’assaut, mais s’il sétait jeté dans Jérusalem il aurait pu aussi rendre la place inexpugnable. La force des intelligences supérieures donne un peu de scepticisme à ceux qui les regardent développer cette force. On dirait que selon qu’elles donnent leur impression d’Orient en Occident ou d’Occident en Orient elles peuvent changer toutes les perspectives des choses. Je voudrais bien être autorisé à montrer le cahier bleu à quelques uns de vos amis. Mais je le tiens sous les sept sceaux jusqu’à nouvel ordre & j’attends la suite avec impatience.
Nous avons relu ici le
Wilhelm Meister de Goëthe. Je me suis promis de vous demander votre avis sur le fond et sur la forme. de la forme, je n’en suis juge en aucune manière. Mais pour le fond, ai-je tort de trouver cela excessivement décousu et chimérique. Ai-je tort de penser que vous avez ouvert à la littérature allemande des routes plus larges, plus droites et qui mèneraient plus loin. On n’a guères avec Goëthe le sentiment d’avoir pied sur la vérité. C’est comme un voyage en l’air où on ne sait si ce sont les objets ou la tête qui tourne.
Recevez, Monsieur, avec tous mes remerciemens, la nouvelle expression de mon tendre & respectueux dévouement.
X Doudan
[3] [leer]
[4] [leer]
[1] 26/VIII Envoi sans lettre. répondu 25 Sept.
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