• Guillaume Favre to August Wilhelm von Schlegel

  • Place of Dispatch: La Grange (Genf) · Place of Destination: Coppet · Date: 24.07.1816
Edition Status: Newly transcribed and labelled; double collated
    Metadata Concerning Header
  • Sender: Guillaume Favre
  • Recipient: August Wilhelm von Schlegel
  • Place of Dispatch: La Grange (Genf)
  • Place of Destination: Coppet
  • Date: 24.07.1816
  • Notations: Empfangsort erschlossen.
    Manuscript
  • Provider: Dresden, Sächsische Landesbibliothek - Staats- und Universitätsbibliothek
  • OAI Id: DE-1a-33563
  • Classification Number: Mscr.Dresd.e.90,XIX,Bd.8,Nr.33
  • Number of Pages: 4S. auf Doppelbl., hs. m. U.
  • Format: 18,9 x 12 cm
  • Incipit: „[1] Jʼai relu, Monsieur, avec plus dʼattention & par conséquent avec plus de plaisir votre écrit sur les Chevaux de [...]“
    Language
  • French
  • Greek
    Editors
  • Dänekas, Laura
  • Seidel, Aline
  • Stieglitz, Clara
[1] Jʼai relu, Monsieur, avec plus dʼattention & par conséquent avec plus de plaisir votre écrit sur les Chevaux de Venise. Jʼai admiré la profonde connaissance de lʼart avec la quelle vous avès donné un nouvel interet à ce beau monument et je viens vous soumettre quelques doutes que cette seconde lecture a fait naitre.
1°. Je ne comprends pas bien votre opinion sur la dorure de certaines statues greques. Entendez vous par le sens que vous attachéz au mot ἐπίχρυσος, une dorure à double feuille & dont les feuilles dʼor étaient plus épaisses que celles dont on se sert maintenant & adhérentes au bronze dans tous ses points au moyen du mercure ou dʼun autre mordant: ou bien croyéz vous que ἐπίχρυσος désigne une enveloppe dʼor qui aurait pu sʼarracher par fragments plus ou moins considerables & qui nʼétait unie au bronze que par juxtàposition. Il semble que ce dernier sens est celui que prèsente ces mots:
couvert de plaques minces dʼor battu.
Je ne vois aucune nècéssité dʼentendre dans cette derniere acceptîon les passages de
Pausanias & dʼHèrodote que vous indiquez. La minerve de Delphes pouvait avoir eu son or gaté (χρυσον λελυμασμενον) par les coups de bec des corbeaux ou par des voleurs qui lʼauraient graté. Lʼavidité [2] peut faire grater des dorures & les Juifs de Turin pendant la rèvolutîon avait acheté le gratage des dorures du Palais du Roi pour 600000. Francs. On estîmait quʼils en auraient tirè beaucoup plus du double. Les lits trouvès dans le camp des Perses étaient ἐπίχρυσους dorés, & Herodote les nomme ainsi par opposition aux lits dʼor massif ou dʼor pur ὀλόχρυσοι.
Je nʼimagine pas quʼon ait pu dèbarasser lʼ
Alexandre de Lysippe de la dorure dont Néron lʼavait fait couvrir, (converso in pretium Deo, comme dit un poete) autrement quʼen le gratant & delà les égratignures qui lui resterent
Reflechisséz, Monsieur, à la difficulté, a lʼimpossibilité dʼhabiller une statue dʼune feuille dʼor sans lui faire perdre toute la delicatesse de ses formes & je suis persuadè que vous penserés que les anciens ne les ont dorées
xxx que par les procedés chimiques. Dʼailleurs Vitruve dit quʼon ne pouvait dorer les métaux quʼau moyen du Mercure.
2°. Lorsque jʼai eu le plaisir de vous voir je vous ai temoigné que jʼavais quelques doutes sur lʼantîque emploi des
Chevaux de Venise & je ne suis pas encore certain quʼils aient été attelés à un Char. Vous mʼavés allegué lʼespece de Collier quʼils portent comme une trace des harnois qui les attellaient. On est assez mal au fait de la maniere dont les anciens attachaient les chevaux aux Chars, les médailles & les monuments presentent [3] ces détails dʼune maniere incomplete et qui souvent ne peut remplir le but. Les principales pieces des harnois que les monuments présentent sont le joug, le collier ou Pectoral nommé προσερυίδιον, la Zône ou Ceinture, & un ornement qui entourait le col près de la tête appellé επτομίδιον De tout cela les Chevaux de Venise ne présentent que le Pectoral et cette piece me parait aussi convenir aux Chevaux de Selle. Il servait dʼornement, ou était utile pour retenir le tapis sur le quel était le Cavalier. Vous pourrés voir ce Pectoral sur des Chevaux de Selle dans les Pl. 31. & 35. de lʼAtlas de Micali, de même que dans les Monum. ined. de Winckelmann n°.22.- Dʼapres cela je crois quʼil nʼest pas encore èvidemment prouvè que ces quatre chevaux aient fait partie dʼun quadrige. Je pense cependant que leur montre & leur taille semblable donnent de la probabilité à cette opinion.
Ainsi que vous lʼaviés pensé un des anonymes que je vous avais cités est nommé
Papios par Mr Mustoxidi. Cet anonyme a extrait plusieurs auteurs & le nom de παπια se trouve à la tete dʼun des divisions de son murage: mais comme cette division sʼetend jusquʼà la fin de lʼouvrage, on ne sait où finit lʼextrait de Papios, ni si le passage sur les Chevaux de Chio en est tîrè. ce Papios nʼest aucun des trois ou quatre [4] auteurs de ce nom qui sont connus
Agrèes, Monsieur, lʼassurance de mes sentimens distingués
Favre Bertrand
La Grange 24 Juillet 1816.
on mʼa dit quʼon avait publié à
Venise un dialogue très piquant & très plaisant entre le Lion de St Marc & les Chevaux de Bronze. Je ne sais si vous en avés quelque connaissance
[1] Jʼai relu, Monsieur, avec plus dʼattention & par conséquent avec plus de plaisir votre écrit sur les Chevaux de Venise. Jʼai admiré la profonde connaissance de lʼart avec la quelle vous avès donné un nouvel interet à ce beau monument et je viens vous soumettre quelques doutes que cette seconde lecture a fait naitre.
1°. Je ne comprends pas bien votre opinion sur la dorure de certaines statues greques. Entendez vous par le sens que vous attachéz au mot ἐπίχρυσος, une dorure à double feuille & dont les feuilles dʼor étaient plus épaisses que celles dont on se sert maintenant & adhérentes au bronze dans tous ses points au moyen du mercure ou dʼun autre mordant: ou bien croyéz vous que ἐπίχρυσος désigne une enveloppe dʼor qui aurait pu sʼarracher par fragments plus ou moins considerables & qui nʼétait unie au bronze que par juxtàposition. Il semble que ce dernier sens est celui que prèsente ces mots:
couvert de plaques minces dʼor battu.
Je ne vois aucune nècéssité dʼentendre dans cette derniere acceptîon les passages de
Pausanias & dʼHèrodote que vous indiquez. La minerve de Delphes pouvait avoir eu son or gaté (χρυσον λελυμασμενον) par les coups de bec des corbeaux ou par des voleurs qui lʼauraient graté. Lʼavidité [2] peut faire grater des dorures & les Juifs de Turin pendant la rèvolutîon avait acheté le gratage des dorures du Palais du Roi pour 600000. Francs. On estîmait quʼils en auraient tirè beaucoup plus du double. Les lits trouvès dans le camp des Perses étaient ἐπίχρυσους dorés, & Herodote les nomme ainsi par opposition aux lits dʼor massif ou dʼor pur ὀλόχρυσοι.
Je nʼimagine pas quʼon ait pu dèbarasser lʼ
Alexandre de Lysippe de la dorure dont Néron lʼavait fait couvrir, (converso in pretium Deo, comme dit un poete) autrement quʼen le gratant & delà les égratignures qui lui resterent
Reflechisséz, Monsieur, à la difficulté, a lʼimpossibilité dʼhabiller une statue dʼune feuille dʼor sans lui faire perdre toute la delicatesse de ses formes & je suis persuadè que vous penserés que les anciens ne les ont dorées
xxx que par les procedés chimiques. Dʼailleurs Vitruve dit quʼon ne pouvait dorer les métaux quʼau moyen du Mercure.
2°. Lorsque jʼai eu le plaisir de vous voir je vous ai temoigné que jʼavais quelques doutes sur lʼantîque emploi des
Chevaux de Venise & je ne suis pas encore certain quʼils aient été attelés à un Char. Vous mʼavés allegué lʼespece de Collier quʼils portent comme une trace des harnois qui les attellaient. On est assez mal au fait de la maniere dont les anciens attachaient les chevaux aux Chars, les médailles & les monuments presentent [3] ces détails dʼune maniere incomplete et qui souvent ne peut remplir le but. Les principales pieces des harnois que les monuments présentent sont le joug, le collier ou Pectoral nommé προσερυίδιον, la Zône ou Ceinture, & un ornement qui entourait le col près de la tête appellé επτομίδιον De tout cela les Chevaux de Venise ne présentent que le Pectoral et cette piece me parait aussi convenir aux Chevaux de Selle. Il servait dʼornement, ou était utile pour retenir le tapis sur le quel était le Cavalier. Vous pourrés voir ce Pectoral sur des Chevaux de Selle dans les Pl. 31. & 35. de lʼAtlas de Micali, de même que dans les Monum. ined. de Winckelmann n°.22.- Dʼapres cela je crois quʼil nʼest pas encore èvidemment prouvè que ces quatre chevaux aient fait partie dʼun quadrige. Je pense cependant que leur montre & leur taille semblable donnent de la probabilité à cette opinion.
Ainsi que vous lʼaviés pensé un des anonymes que je vous avais cités est nommé
Papios par Mr Mustoxidi. Cet anonyme a extrait plusieurs auteurs & le nom de παπια se trouve à la tete dʼun des divisions de son murage: mais comme cette division sʼetend jusquʼà la fin de lʼouvrage, on ne sait où finit lʼextrait de Papios, ni si le passage sur les Chevaux de Chio en est tîrè. ce Papios nʼest aucun des trois ou quatre [4] auteurs de ce nom qui sont connus
Agrèes, Monsieur, lʼassurance de mes sentimens distingués
Favre Bertrand
La Grange 24 Juillet 1816.
on mʼa dit quʼon avait publié à
Venise un dialogue très piquant & très plaisant entre le Lion de St Marc & les Chevaux de Bronze. Je ne sais si vous en avés quelque connaissance
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