• August Wilhelm von Schlegel to Auguste Louis de Staël-Holstein

  • Place of Dispatch: Bonn · Place of Destination: Unknown · Date: 08.01.1824
Edition Status: Single collated printed full text with registry labelling
    Metadata Concerning Header
  • Sender: August Wilhelm von Schlegel
  • Recipient: Auguste Louis de Staël-Holstein
  • Place of Dispatch: Bonn
  • Place of Destination: Unknown
  • Date: 08.01.1824
    Printed Text
  • Provider: Dresden, Sächsische Landesbibliothek - Staats- und Universitätsbibliothek
  • OAI Id: 335973167
  • Bibliography: Krisenjahre der Frühromantik. Briefe aus dem Schlegelkreis. Hg. v. Josef Körner. Bd. 2. Der Texte zweite Hälfte. 1809‒1844. Bern u.a. ²1969, S. 427‒428.
  • Incipit: „Bonn 8 Janvier 1824
    Śubham astu
    Felix faustumque sit!
    Dʼabord nos bons souhaits du nouvel an à vous tous. Ensuite, mon cher Auguste, grondez [...]“
    Language
  • French
Bonn 8 Janvier 1824
Śubham astu
Felix faustumque sit!
Dʼabord nos bons souhaits du nouvel an à vous tous. Ensuite, mon cher Auguste, grondez moi, je le mérite, – dʼailleurs cela me con[ip]tera pour une pénitence et mʼépargnera la peine de me corriger. Cʼest du moins la morale des faquirs, tant payens que chrétiens. Vous me pardonnerez de ne pas avoir passé la mer avec vous, en apprenant que jʼai trainé à Londres encore huit jours après vous. Il est vrai que cʼétoit principalement pour être utile à ma pauvre petite nièce, et jʼy ai passablement réussi. Le 10 Dec. déjà elle avoit pas mal de portraits à faire, et votre belle lettre de recommandation, ainsi que quelques autres pour de grandes dames, nʼavoient pas encore pu produire leur effet. Je nʼavois garde dʼimportuner à ce sujet un homme aussi accablé dʼaffaires importantes que lʼest Brougham – cʼétoit comme par hasard que je lui fis part un des derniers jours de mes soucis paternels. Il y prit le plus vif intérêt, il a eu tout plein de bontés pour elle depuis mon départ – cʼest infiniment aimable et je lui en aurai une reconnoissance éternelle. Sir Humphry Davy et moi nous nous sommes toujours manqués et je suis reparti sans lʼavoir vu. Je lui écrivis à la fin et il mʼa répondu on ne peut pas plus obligeamment. Il dit entre autres que lui et Lady Davy eussent désiré que le moment fût plus favorable pour cultiver „an acquaintance from which we have derived pleasure, and which is associated with the memory of a bright light of departed genius.” – Cette expression dʼune admiration mêlée de sensibilité mʼa touché de la part dʼun homme de génie, mais dans une sphère totalement différente.
Mon cher Auguste, je vous envoye sous bandes par le Courier dʼaujourdʼhui deux exemplaires de mon Bhagavad-Gîta. Je vous prie de faire relier proprement lʼun et de le présenter avec mes hommages respectueux au Duc dʼOrléans comme patron de la Société Asiatique. Si vous jugez à propos que jʼécrive une lettre, mandez le moi. Lʼautre est destiné pour votre divine sœur – offrez-le lui en faisant un ashtânga pâta en mon nom – cʼest à dire quʼon se prosterne, huit membres par terre, qui sont, si je ne me trompe, les genoux, les mains, le front, les yeux et la bouche. – Dites-lui que je prétends quʼelle me lise, cʼest à dire ma traduction. Cʼest de la théologie et de la plus profonde. On mʼassure que mon style Latin est très clair, et la majesté de la langue Romaine va à merveille avec le ton prophétique et inspiré de ces anciens sages. Jʼécrirai incessamment à votre sœur – je veux seulement préparer une bonne reception à une lettre aussi tardive.
Depuis mon retour je suis casé comfortablement, et je vivotte comme de coûtume plongé dans mes études. Jʼai eu une visite fort agréable dʼun Baron Schilling de Canstadt, né à St. Petersbourg dʼune famille allemande, cousin de la comtesse de Lieven. Cʼest un homme dʼesprit, aimable, et orientaliste passionné. Nous avons causé pendant plusieurs jours Chine, Japon, Tibet, etc – lʼInde étoit ce quʼil y avoit de plus rapproché. Hier jʼai reçu une lettre de 16 pages de Calcutta. En général, je nʼai presque plus quʼun pied à terre en Europe.
Mille remercimens de votre compte des finances. Les Treuttel mʼécrivent à lʼinstant que dʼaprès mes nouveaux arrangemens avec leur maison de Londres, ils ont reportés les ₤ 120'' 50'' sur mon compte; ils doivent donc les déduire du vôtre. – Voulez-vous prier de ma part Mr Delaville Le Roulx, de mʼenvoyer son compte courant de lʼannée. Je voudrois savoir ce que jʼai dʼargent disponible, je pourrois en avoir besoin pour lʼachat de ma maison. Car du reste je vis avec une grande économie pour me refaire de mon voyage – un jour de Londres me suffit pour une semaine. – Les fonds françois sont à un taux merveilleux.
Vous avez bien raison – les nations ont jété un joli coton. Bien bête qui sera désormais la dupe du genre humain! Jʼy ai perdu aussi pour ma part trois bouteilles de vin de Champagne que jʼavois pariées pour la cause Espagnole et je nʼen veux plus entendre parler.
Dites mille choses de ma part à votre sœur, à Mr de Broglie, à Mlle Randall, au cher Alfonse et aux belles princesses. Jʼespère que Mlle Randall est mieux. Adieu, mon cher Auguste – mille tendres amitiés.
Bonn 8 Janvier 1824
Śubham astu
Felix faustumque sit!
Dʼabord nos bons souhaits du nouvel an à vous tous. Ensuite, mon cher Auguste, grondez moi, je le mérite, – dʼailleurs cela me con[ip]tera pour une pénitence et mʼépargnera la peine de me corriger. Cʼest du moins la morale des faquirs, tant payens que chrétiens. Vous me pardonnerez de ne pas avoir passé la mer avec vous, en apprenant que jʼai trainé à Londres encore huit jours après vous. Il est vrai que cʼétoit principalement pour être utile à ma pauvre petite nièce, et jʼy ai passablement réussi. Le 10 Dec. déjà elle avoit pas mal de portraits à faire, et votre belle lettre de recommandation, ainsi que quelques autres pour de grandes dames, nʼavoient pas encore pu produire leur effet. Je nʼavois garde dʼimportuner à ce sujet un homme aussi accablé dʼaffaires importantes que lʼest Brougham – cʼétoit comme par hasard que je lui fis part un des derniers jours de mes soucis paternels. Il y prit le plus vif intérêt, il a eu tout plein de bontés pour elle depuis mon départ – cʼest infiniment aimable et je lui en aurai une reconnoissance éternelle. Sir Humphry Davy et moi nous nous sommes toujours manqués et je suis reparti sans lʼavoir vu. Je lui écrivis à la fin et il mʼa répondu on ne peut pas plus obligeamment. Il dit entre autres que lui et Lady Davy eussent désiré que le moment fût plus favorable pour cultiver „an acquaintance from which we have derived pleasure, and which is associated with the memory of a bright light of departed genius.” – Cette expression dʼune admiration mêlée de sensibilité mʼa touché de la part dʼun homme de génie, mais dans une sphère totalement différente.
Mon cher Auguste, je vous envoye sous bandes par le Courier dʼaujourdʼhui deux exemplaires de mon Bhagavad-Gîta. Je vous prie de faire relier proprement lʼun et de le présenter avec mes hommages respectueux au Duc dʼOrléans comme patron de la Société Asiatique. Si vous jugez à propos que jʼécrive une lettre, mandez le moi. Lʼautre est destiné pour votre divine sœur – offrez-le lui en faisant un ashtânga pâta en mon nom – cʼest à dire quʼon se prosterne, huit membres par terre, qui sont, si je ne me trompe, les genoux, les mains, le front, les yeux et la bouche. – Dites-lui que je prétends quʼelle me lise, cʼest à dire ma traduction. Cʼest de la théologie et de la plus profonde. On mʼassure que mon style Latin est très clair, et la majesté de la langue Romaine va à merveille avec le ton prophétique et inspiré de ces anciens sages. Jʼécrirai incessamment à votre sœur – je veux seulement préparer une bonne reception à une lettre aussi tardive.
Depuis mon retour je suis casé comfortablement, et je vivotte comme de coûtume plongé dans mes études. Jʼai eu une visite fort agréable dʼun Baron Schilling de Canstadt, né à St. Petersbourg dʼune famille allemande, cousin de la comtesse de Lieven. Cʼest un homme dʼesprit, aimable, et orientaliste passionné. Nous avons causé pendant plusieurs jours Chine, Japon, Tibet, etc – lʼInde étoit ce quʼil y avoit de plus rapproché. Hier jʼai reçu une lettre de 16 pages de Calcutta. En général, je nʼai presque plus quʼun pied à terre en Europe.
Mille remercimens de votre compte des finances. Les Treuttel mʼécrivent à lʼinstant que dʼaprès mes nouveaux arrangemens avec leur maison de Londres, ils ont reportés les ₤ 120'' 50'' sur mon compte; ils doivent donc les déduire du vôtre. – Voulez-vous prier de ma part Mr Delaville Le Roulx, de mʼenvoyer son compte courant de lʼannée. Je voudrois savoir ce que jʼai dʼargent disponible, je pourrois en avoir besoin pour lʼachat de ma maison. Car du reste je vis avec une grande économie pour me refaire de mon voyage – un jour de Londres me suffit pour une semaine. – Les fonds françois sont à un taux merveilleux.
Vous avez bien raison – les nations ont jété un joli coton. Bien bête qui sera désormais la dupe du genre humain! Jʼy ai perdu aussi pour ma part trois bouteilles de vin de Champagne que jʼavois pariées pour la cause Espagnole et je nʼen veux plus entendre parler.
Dites mille choses de ma part à votre sœur, à Mr de Broglie, à Mlle Randall, au cher Alfonse et aux belles princesses. Jʼespère que Mlle Randall est mieux. Adieu, mon cher Auguste – mille tendres amitiés.
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