• Désiré Raoul Rochette to August Wilhelm von Schlegel

  • Place of Dispatch: Paris · Place of Destination: Bonn · Date: 03.11.1835 bis 04.11.1835
Edition Status: Newly transcribed and labelled; double collated
    Metadata Concerning Header
  • Sender: Désiré Raoul Rochette
  • Recipient: August Wilhelm von Schlegel
  • Place of Dispatch: Paris
  • Place of Destination: Bonn
  • Date: 03.11.1835 bis 04.11.1835
  • Notations: Empfangsort erschlossen.
    Manuscript
  • Provider: Dresden, Sächsische Landesbibliothek - Staats- und Universitätsbibliothek
  • OAI Id: DE-611-35028
  • Classification Number: Mscr.Dresd.e.90,XIX,Bd.18,Nr.9
  • Number of Pages: 4 S. auf Doppelbl., hs. m. U.
  • Format: 25 x 19,7 cm
  • Incipit: „[1] Cabinet des MÉDAILLES ET ANTIQUES. Bibliothèque Royale.
    Paris, le 3 IXbre 1835
    Monsieur,
    C’est seulement aujourdhui que j’ai reçu par le ministère [...]“
    Language
  • French
  • Greek
    Editors
  • Dänekas, Laura
  • Golyschkin, Ruth
  • Seidel, Aline
[1] Cabinet des MÉDAILLES ET ANTIQUES. Bibliothèque Royale.
Paris, le 3 IXbre 1835
Monsieur,
C’est seulement aujourdhui que j’ai reçu par le
ministère des Affaires étrangères, votre lettre du 12 octobre, à laquelle je m’empresse de répondre, et pour vous en témoigner tous mes remercimens, et pour m’excuser à vos yeux d’un retard, qui, s’il venait de mon fait, serait un tort dont je suis incapable, et dont je serais désolé, fût-il même involontaire.
Je suis on ne peut plus sensible à l’intéret qu’a pu vous inspirer, monsieur,
le petit travail sur les médailles grecques bactriennes, que j’avais publié l’année dernière; et je suis, s’il est possible, encore plus reconnoissant des observations que vous voulez bien me communiquer au sujet de nouvelles médailles, grecques et indo-bactriennes, nouvellement publiées dans le Journal asiatique de Calcutta. Je viens aussi d’avoir connoissance de ces médailles, mais malheureusement, après la publication d’un premier article, destiné a servir de Supplément à ma précédente Notice, et inséré dans le cahier de Septembre du Journal des Savants. Un second article, qui fera partie du cahier d’octobre, est déja imprimé et tiré; mais, comme il n’a pas encore paru, je pourrai ajouter à la fin une note contenant l’annonce de plusieurs des médailles les plus rares de la collection du général Allard, et une ou deux petites rectifications de détail. Une de ces rectifications portera sur la médaille du Roi Anti-la Kidès, dont je n’avais eu à ma disposition qu’un exemplaire très mal conservé, et où je n’avais pu lire la légende: ΒΑΣΙΛΕΩΣ..ΚΗΦΟ-ΡΟΥ..ΤΙΛΑΚΙΔΟΥ, dans le facheux état où se trouvait cette médaille. Mais les deux exemplaires que j’en ai trouvés, sur l’une des planches du Journal asiatique, m’ont permis de rétablir cette légende, qui nous fait connaitre avec toute certitude ce roi Nicéphore AntilaKidès.
Je dois bien regretter aussi, Monsieur, que votre lettre ne me soit pas parvenue plus tôt. J’en aurais profité pour améliorer mon travail, et pour modifier plusieurs petites observations que j’ai pris
[2] la liberté de faire, au sujet de votre article du Nouveau Journal Asiatique de Paris. Mais la collection du général Allard, qui est destinée à enrichir notre Cabinet, va me mettre en possession de tout un trésor numismatique, qui m’offrira la matière d’un second supplément, bien plus riche, bien plus considérable que le premier. J’aurai bien, dans ce nouveau travail dont je vais m’occuper, de mettre à profit les excellentes observations que contient votre lettre; et je vous demande, monsieur, comme une faveur, la permission d’en faire usage.
Je prends la liberté de joindre à cette lettre les épreuves des deux planches de médailles bactriennes, qui forment le sujet de mon
supplément inséré aux cahiers de septembre et d’octobre du Journal des Savants. Ces médailles viennent toutes du Dr. Honigberger, qui les avait recueillies en grande partie à Caboul et à Bokhara; elles appartiennent encore à M. Rollin; mais j’espère qu’elles viendront bientôt se joindre à celles de notre cabinet. Vous y verrez, en fait de monumens, tout à fait nouveaux, les médailles en argent et en bronze du Roi Sauveur Hermæos, ἙΡΜΑΙΟΥ; celles du grand Roi des Rois, Azès, que j’ai cru pouvoir regarder comme un chef de cette tribu des Scythes Ἄσισι, qui contribuèrent, suivant le témoignage de Strabon, à détruire la puissance des Grecs de la Bactriane. Vous y reconnaitrez la médaille du major Tod, où vous aviez cru lire, d’après une gravure trop défectueuse, la légende BαηΤΡΩv Bασιλεύς; mais dont l’inscription est indubitablement: ΒΑCΙΛΕΥC ΒΑCΙΛΕΩΝ CωΤΗΡ ΜΕCAC; et ce qui ne saurait manquer d’exciter tout votre intéret, c’est de retrouver aussi la même médaille, avec le même type des deux côtés, et avec la même inscription, mais de grand module, dont j’ai vu plusieurs exemplaires, tous de bonne conservation, rapportés par Honigberger. La tête gravée sur ces médailles est décidément radiée; et ce doit être la tête du Soleil, et non celle d’un Roi, comme je l’avais cru; c’est encore une rectification que j’aurais due à l’inspection des médailles du général Allard, une desquelles, en or, de petit module, offre le personnage entier, accompagné des lettres grecques ΗΛΙΟC, qui ne permettent pas d’y méconnaitre le soleil.
[3] Deux exemplaires de la médaille d’or du Roi MoKadphisès, ΜΟΚΑΔ-ΦΙCΗC ΒΑCΙΛΕΥC ΟΟΗ (Sic), forment le principal ornement de la collection Honigberger; j’en publie un, accompagné de la monnaie de bronze du même prince, avec sa figure debout, en costume tartare, le type indien au revers, et l’inscription grecque: ΜΟΚΑΔΦΙCΗC ΒΑCΙΛΕΥC ΒΑCΙΛΕΩΝ CΩΤΗΡ ΜΕCΑC. C’est là la médaille de votre roi Édobigris, qui, décidément, doit être rayé de la numismatique et de l’histoire. Mais qui, dumoins, y occupait à meilleur titre la place qu’il a plu à M. Prinsep d’attribuer à son ΗΕΓΑC: attribution assurément bien ridicule, comme vous dites, monsieur. ce pauvre M. Prinsep a vu aussi un roi grec Ausius, sur des médailles qui portent clairement pour tous les yeux l’inscription: ΒΑΣΙΛΕΩΣ ΑΝΙΚΗΤΟΥ ΛΥΣΙΟΥ, du Roi invincible Lysias; et je m’étonne qu’il n’ait pas défiguré mon Hermæos; bien que la couronne nysæenne, dont il le gratifie, me paraisse, comme à vous, tout à fait imaginaire. Quant à MoKadphisès, dont il veut faire Kadphisès, c’est bien gratuitement qu’il aura pris la peine de défigurer ce nom désormais historique. l’inscription des deux monnaies d’or, justifiée par un grand nombre des pièces de bronze, que j’ai eues entre les mains, ne laisse aucun doute sur la vraie leçon, qui est: ΜΟΚΑΔΦΙCΗC, comme vous l’avez très-bien vu, monsieur, et comme je serai charmé de le reconnaitre à la première occasion.
Je devrais vous parler maintenant des médailles qui sont en la possession du
général Allard; mais cette collection est si considérable, et j’ai si peu d’espace, avec la crainte d’abuser de votre patience, que je dois me borner ici à quelques mots. je n’ai vu d’ailleurs jusqu’à présent, que les médailles grecques; mon confrère, M. E. Burnouf, a pu voir et examiner avec de meilleurs yeux que les miens, assisté de ceux de M. Jacquet, les médailles qui offrent des types indiens et des inscriptions pehlvis. Dans le nombre des plus curieuses, figure celle que je vous ai déja signalée,- Monsieur, avec la figure en pied du Soleil, et son nom ΗΛΙΟC. ce qui ne vous paraitra sans doute pas moins curieux, c’est une médaille en bronze, de grand module, avec une tête d’éléphant, d’un côté de l’autre, un caducée, et l’inscription, en lettres grecques, de grande proportion, mais d’une forme qui accuse la décadence: ΒΑCΙΛΕΩC ΜΑΥΟΥ. S’il s’agit ici d’un Roi Lunus, ou Mârs, l’apparition du nom ΜΑΥΟΥ est certainement rare et curieuse; la médaille est d’ailleurs d’une authenticité indubitable.
[4] Quant aux médailles grecques, elles sont toutes du premier ordre, sous tous les rapports qui peuvent rendre recommandables et précieux pour la science, des monuments numismatiques. Il s’y trouve un tétradrachme d’Agathocle, pièce superbe, avec le même type que la drachme que j’ai publiée l’année dernière; une drachme d’Antimachus, monnaie nouvelle, d’un prince qui n’était connue jusqu’ici que par le tétradrachme qu’avait publié M. de Koehler; une drachme de Démétrius, qui reproduit aussi les deux types du beau tétradrachme publié par Tychsen, plusieurs drachmes, de types différents, de Ménandre et d’Apollodote, une entre autres, de ce dernier prince, de forme carrée, particularité unique jusqu’ici dans la numismatique grecque bactrienne, et avec la légende: ΒΑΣΙΛΕΩΣΑΜΟΛΛΟΔΟΤΟΥ ΣΩΤΗΡΟΣ; des monnaies de bronze, et un didrachme, pièce d’argent, unique de ce module, avec l’inscription du Roi invincible Philoxène: ΒΑΣΙΛΕΩΣ ΑΝΙΚΗΤΟΥ ΦΙΛΟΞΕΝΟΥ. Je ne finirai pas cette lettre, et j’abuserai de votre bonté, si je voulais rendre cette énumération complète. Je me réserve, si vous me le permettez, de vous entretenir une autre fois plus en détail d’une collection, qui doit bientôt arriver à notre cabinet, et qui fournira certainement à nos savants indianistes, autant et plus qu’à moi, la matière de travaux neufs et importants.
Souffrez, Monsieur, qu’en terminant cette lettre, je vous offre de nouveau l’expression vive et sincère de mes remercimens, et que j’y joigne l’hommage respectueux des sentimens de mon haute estime et de ma considération profonde,
Raoul-Rochette
4 IX.
bre P.S. votre idée sur le Siva moitié Femme me parait excellente, et très-propre en effet à rendre compte du type des médailles d’or et de bronze de MoKadphisès, où la figure indienne apparait véritablement androgyne. c’est là un de ces rapports entre la mythologie asiatique et l’archéologie grecque, où figurent tant de génies à double sexe, qui deviennent de jour en jour plus frappants et plus sensibles. Je compte publier l’année prochaine un premier essai de cette archéologie comparée, dont je travaille déja depuis plusieurs années à rassembler les matériaux, et que je composera d’un certain nombre de types empruntés à la haute Asie, et appropriés à l’art des Grecs et des Etrusques, sur les monumens desquels il nous en est resté de nombreuses réminiscences. c’est pour préluder à cette publication, que j’avais pris cette année, pour toute de mes leçons, la description des antiquités babyloniennes et phéniciennes, dont je prends la liberté de vous adresser le programme.
[1] Répondu le 17 Nov. 35.
[1] Cabinet des MÉDAILLES ET ANTIQUES. Bibliothèque Royale.
Paris, le 3 IXbre 1835
Monsieur,
C’est seulement aujourdhui que j’ai reçu par le
ministère des Affaires étrangères, votre lettre du 12 octobre, à laquelle je m’empresse de répondre, et pour vous en témoigner tous mes remercimens, et pour m’excuser à vos yeux d’un retard, qui, s’il venait de mon fait, serait un tort dont je suis incapable, et dont je serais désolé, fût-il même involontaire.
Je suis on ne peut plus sensible à l’intéret qu’a pu vous inspirer, monsieur,
le petit travail sur les médailles grecques bactriennes, que j’avais publié l’année dernière; et je suis, s’il est possible, encore plus reconnoissant des observations que vous voulez bien me communiquer au sujet de nouvelles médailles, grecques et indo-bactriennes, nouvellement publiées dans le Journal asiatique de Calcutta. Je viens aussi d’avoir connoissance de ces médailles, mais malheureusement, après la publication d’un premier article, destiné a servir de Supplément à ma précédente Notice, et inséré dans le cahier de Septembre du Journal des Savants. Un second article, qui fera partie du cahier d’octobre, est déja imprimé et tiré; mais, comme il n’a pas encore paru, je pourrai ajouter à la fin une note contenant l’annonce de plusieurs des médailles les plus rares de la collection du général Allard, et une ou deux petites rectifications de détail. Une de ces rectifications portera sur la médaille du Roi Anti-la Kidès, dont je n’avais eu à ma disposition qu’un exemplaire très mal conservé, et où je n’avais pu lire la légende: ΒΑΣΙΛΕΩΣ..ΚΗΦΟ-ΡΟΥ..ΤΙΛΑΚΙΔΟΥ, dans le facheux état où se trouvait cette médaille. Mais les deux exemplaires que j’en ai trouvés, sur l’une des planches du Journal asiatique, m’ont permis de rétablir cette légende, qui nous fait connaitre avec toute certitude ce roi Nicéphore AntilaKidès.
Je dois bien regretter aussi, Monsieur, que votre lettre ne me soit pas parvenue plus tôt. J’en aurais profité pour améliorer mon travail, et pour modifier plusieurs petites observations que j’ai pris
[2] la liberté de faire, au sujet de votre article du Nouveau Journal Asiatique de Paris. Mais la collection du général Allard, qui est destinée à enrichir notre Cabinet, va me mettre en possession de tout un trésor numismatique, qui m’offrira la matière d’un second supplément, bien plus riche, bien plus considérable que le premier. J’aurai bien, dans ce nouveau travail dont je vais m’occuper, de mettre à profit les excellentes observations que contient votre lettre; et je vous demande, monsieur, comme une faveur, la permission d’en faire usage.
Je prends la liberté de joindre à cette lettre les épreuves des deux planches de médailles bactriennes, qui forment le sujet de mon
supplément inséré aux cahiers de septembre et d’octobre du Journal des Savants. Ces médailles viennent toutes du Dr. Honigberger, qui les avait recueillies en grande partie à Caboul et à Bokhara; elles appartiennent encore à M. Rollin; mais j’espère qu’elles viendront bientôt se joindre à celles de notre cabinet. Vous y verrez, en fait de monumens, tout à fait nouveaux, les médailles en argent et en bronze du Roi Sauveur Hermæos, ἙΡΜΑΙΟΥ; celles du grand Roi des Rois, Azès, que j’ai cru pouvoir regarder comme un chef de cette tribu des Scythes Ἄσισι, qui contribuèrent, suivant le témoignage de Strabon, à détruire la puissance des Grecs de la Bactriane. Vous y reconnaitrez la médaille du major Tod, où vous aviez cru lire, d’après une gravure trop défectueuse, la légende BαηΤΡΩv Bασιλεύς; mais dont l’inscription est indubitablement: ΒΑCΙΛΕΥC ΒΑCΙΛΕΩΝ CωΤΗΡ ΜΕCAC; et ce qui ne saurait manquer d’exciter tout votre intéret, c’est de retrouver aussi la même médaille, avec le même type des deux côtés, et avec la même inscription, mais de grand module, dont j’ai vu plusieurs exemplaires, tous de bonne conservation, rapportés par Honigberger. La tête gravée sur ces médailles est décidément radiée; et ce doit être la tête du Soleil, et non celle d’un Roi, comme je l’avais cru; c’est encore une rectification que j’aurais due à l’inspection des médailles du général Allard, une desquelles, en or, de petit module, offre le personnage entier, accompagné des lettres grecques ΗΛΙΟC, qui ne permettent pas d’y méconnaitre le soleil.
[3] Deux exemplaires de la médaille d’or du Roi MoKadphisès, ΜΟΚΑΔ-ΦΙCΗC ΒΑCΙΛΕΥC ΟΟΗ (Sic), forment le principal ornement de la collection Honigberger; j’en publie un, accompagné de la monnaie de bronze du même prince, avec sa figure debout, en costume tartare, le type indien au revers, et l’inscription grecque: ΜΟΚΑΔΦΙCΗC ΒΑCΙΛΕΥC ΒΑCΙΛΕΩΝ CΩΤΗΡ ΜΕCΑC. C’est là la médaille de votre roi Édobigris, qui, décidément, doit être rayé de la numismatique et de l’histoire. Mais qui, dumoins, y occupait à meilleur titre la place qu’il a plu à M. Prinsep d’attribuer à son ΗΕΓΑC: attribution assurément bien ridicule, comme vous dites, monsieur. ce pauvre M. Prinsep a vu aussi un roi grec Ausius, sur des médailles qui portent clairement pour tous les yeux l’inscription: ΒΑΣΙΛΕΩΣ ΑΝΙΚΗΤΟΥ ΛΥΣΙΟΥ, du Roi invincible Lysias; et je m’étonne qu’il n’ait pas défiguré mon Hermæos; bien que la couronne nysæenne, dont il le gratifie, me paraisse, comme à vous, tout à fait imaginaire. Quant à MoKadphisès, dont il veut faire Kadphisès, c’est bien gratuitement qu’il aura pris la peine de défigurer ce nom désormais historique. l’inscription des deux monnaies d’or, justifiée par un grand nombre des pièces de bronze, que j’ai eues entre les mains, ne laisse aucun doute sur la vraie leçon, qui est: ΜΟΚΑΔΦΙCΗC, comme vous l’avez très-bien vu, monsieur, et comme je serai charmé de le reconnaitre à la première occasion.
Je devrais vous parler maintenant des médailles qui sont en la possession du
général Allard; mais cette collection est si considérable, et j’ai si peu d’espace, avec la crainte d’abuser de votre patience, que je dois me borner ici à quelques mots. je n’ai vu d’ailleurs jusqu’à présent, que les médailles grecques; mon confrère, M. E. Burnouf, a pu voir et examiner avec de meilleurs yeux que les miens, assisté de ceux de M. Jacquet, les médailles qui offrent des types indiens et des inscriptions pehlvis. Dans le nombre des plus curieuses, figure celle que je vous ai déja signalée,- Monsieur, avec la figure en pied du Soleil, et son nom ΗΛΙΟC. ce qui ne vous paraitra sans doute pas moins curieux, c’est une médaille en bronze, de grand module, avec une tête d’éléphant, d’un côté de l’autre, un caducée, et l’inscription, en lettres grecques, de grande proportion, mais d’une forme qui accuse la décadence: ΒΑCΙΛΕΩC ΜΑΥΟΥ. S’il s’agit ici d’un Roi Lunus, ou Mârs, l’apparition du nom ΜΑΥΟΥ est certainement rare et curieuse; la médaille est d’ailleurs d’une authenticité indubitable.
[4] Quant aux médailles grecques, elles sont toutes du premier ordre, sous tous les rapports qui peuvent rendre recommandables et précieux pour la science, des monuments numismatiques. Il s’y trouve un tétradrachme d’Agathocle, pièce superbe, avec le même type que la drachme que j’ai publiée l’année dernière; une drachme d’Antimachus, monnaie nouvelle, d’un prince qui n’était connue jusqu’ici que par le tétradrachme qu’avait publié M. de Koehler; une drachme de Démétrius, qui reproduit aussi les deux types du beau tétradrachme publié par Tychsen, plusieurs drachmes, de types différents, de Ménandre et d’Apollodote, une entre autres, de ce dernier prince, de forme carrée, particularité unique jusqu’ici dans la numismatique grecque bactrienne, et avec la légende: ΒΑΣΙΛΕΩΣΑΜΟΛΛΟΔΟΤΟΥ ΣΩΤΗΡΟΣ; des monnaies de bronze, et un didrachme, pièce d’argent, unique de ce module, avec l’inscription du Roi invincible Philoxène: ΒΑΣΙΛΕΩΣ ΑΝΙΚΗΤΟΥ ΦΙΛΟΞΕΝΟΥ. Je ne finirai pas cette lettre, et j’abuserai de votre bonté, si je voulais rendre cette énumération complète. Je me réserve, si vous me le permettez, de vous entretenir une autre fois plus en détail d’une collection, qui doit bientôt arriver à notre cabinet, et qui fournira certainement à nos savants indianistes, autant et plus qu’à moi, la matière de travaux neufs et importants.
Souffrez, Monsieur, qu’en terminant cette lettre, je vous offre de nouveau l’expression vive et sincère de mes remercimens, et que j’y joigne l’hommage respectueux des sentimens de mon haute estime et de ma considération profonde,
Raoul-Rochette
4 IX.
bre P.S. votre idée sur le Siva moitié Femme me parait excellente, et très-propre en effet à rendre compte du type des médailles d’or et de bronze de MoKadphisès, où la figure indienne apparait véritablement androgyne. c’est là un de ces rapports entre la mythologie asiatique et l’archéologie grecque, où figurent tant de génies à double sexe, qui deviennent de jour en jour plus frappants et plus sensibles. Je compte publier l’année prochaine un premier essai de cette archéologie comparée, dont je travaille déja depuis plusieurs années à rassembler les matériaux, et que je composera d’un certain nombre de types empruntés à la haute Asie, et appropriés à l’art des Grecs et des Etrusques, sur les monumens desquels il nous en est resté de nombreuses réminiscences. c’est pour préluder à cette publication, que j’avais pris cette année, pour toute de mes leçons, la description des antiquités babyloniennes et phéniciennes, dont je prends la liberté de vous adresser le programme.
[1] Répondu le 17 Nov. 35.
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