Jʼai eu un regret infini, Monsieur, de ne pas vous trouver hier chez vous, ni à la campagne, ni en ville; je mʼétais pourtant mis en route de bien bon matin. Jʼespère mʼen dédommager une autre fois. Faites-moi savoir, de grâce, si vous passerez à la Grange la matinée du samedi prochain?
En attendant, je vous prie de mʼaccorder quelques secours littéraires. Jʼai expédié les Romains; je suis à présent occupé du groupe de Niobé, par rapport à lʼhypothèse de Cockerell, dont je crois vous avoir montré la feuille gravée. Je soutiens à cette occasion que les Grecs, dans la belle époque de lʼart, ont toujours placé dans les frontons de leurs temples des statues et non pas des bas-reliefs, et que cet usage est presque aussi ancien que lʼinvention du fronton même. Il doit y avoir eu des statues dans celui du grand temple de Pæstum, quoiquʼon nʼen ait point trouvé de traces. Nous le savons par rapport au temple de Jupiter Olympien à Agrigente, par Diodore de Sicile. Je pense que le tympan du fronton nʼa été orné de bas-reliefs que du temps des empereurs romains; cependant, je ne me rappelle aucun monument antique où lʼon en ait trouvé. Jʼespère trouver quelque lumière là-dessus dans Vitruve.
Les passages que je voudrais inspecter se trouvent dans Pausanias, dans Vitruve et dans le XIIIme livre de Diodore de Sicile. Si vous aviez une édition portable de ces livres, le messager qui doit vous porter cette lettre pourrait les remettre aux gens de Mme de Staël qui seront en commission à Genève demain matin, et qui retourneront de bonne heure à Coppet. Autrement, si cela vous donne trop de peine, je vous prierai de les envoyer chez Paschoud avec mon adresse. Ce qui me rend si importun, cʼest que jʼai promis un article à ce sujet à la Bibliothèque Universelle, et que M. Pictet me presse fort.
Au plaisir de vous revoir.
Tout à vous,
SCHLEGEL.