• August Wilhelm von Schlegel to Auguste Louis de Staël-Holstein

  • Place of Dispatch: Bonn · Place of Destination: Unknown · Date: 12.08.1822
Edition Status: Single collated printed full text with registry labelling
    Metadata Concerning Header
  • Sender: August Wilhelm von Schlegel
  • Recipient: Auguste Louis de Staël-Holstein
  • Place of Dispatch: Bonn
  • Place of Destination: Unknown
  • Date: 12.08.1822
    Printed Text
  • Provider: Dresden, Sächsische Landesbibliothek - Staats- und Universitätsbibliothek
  • OAI Id: 335973167
  • Bibliography: Krisenjahre der Frühromantik. Briefe aus dem Schlegelkreis. Hg. v. Josef Körner. Bd. 2. Der Texte zweite Hälfte. 1809‒1844. Bern u.a. ²1969, S. 401‒403.
  • Incipit: „Bonn 12 Août 1822
    Vous étes divin et adorable, mon cher Auguste – vous ajoutez en ma faveur un treizieme aux douze [...]“
    Language
  • French
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Bonn 12 Août 1822
Vous étes divin et adorable, mon cher Auguste – vous ajoutez en ma faveur un treizieme aux douze travaux dʼHercule. Je vous demande un million de pardons dʼavoir tardé si long-temps à répondre à votre première lettre. Jʼai été abimé de travail et pendant quinze jours je me suis porté passablement mal, de sorte que jʼai été tout découragé et que jʼai fait beaucoup de reflexions sur la briéveté de la vie humaine. Ce nʼétoit rien de nouveau – cependant jʼai un ennemi intérieur, dont la force vitale tâche de se debarasser, et qui semble renaître comme lʼhydre. Mon medecin se moque de mes appréhensions, et moi même, je nʼy pense plus, dès que je suis remis sur pied, et que je puis me livrer à lʼactivité intellectuelle.
Je reçois aujourdʼhui votre lettre de Lambton. Il y a quelques jours quʼil mʼen est arrivé une de Colebrooke, laquelle mʼannonce que la Société de Calcutta mʼa élu Honorary member, ce qui mʼest infiniment agréable. Je ne lʼavois espéré que dans deux ans dʼici. Colebrooke me parle aussi des observations quʼon a opposées à mes critiques, et quʼil veut me communiquer. Le fait est que jʼai écrit mes vues générales sur lʼétat actuel de la philologie Indienne sans me gêner et sans avoir la pensée que jamais cela pût être lû dans lʼInde; je me suis servi par ci par là de formes assez acerbes. Lorsque jʼai envoyé ma Bibliothèque Indienne à Colebrooke je lui ai dit: Voyez si vous voulez envoyer cela à Calcutta, je vous en fais juge, il y a des choses là-dedans qui doivent déplaire à plusieurs personnes en Asie. Il mʼa répondu, que je ne devois me faire aucun scrupule, que dans les recherches savantes il falloit admettre la discussion la plus franche. Les critiques de loin sont toujours plus vivement ressenties que de près – jʼen ai fait lʼexpérience, il y a nombre dʼannées, lorsque jʼeus passé en revue dans une lettre à Goethe Canova et les autres artistes de Rome. Il est dʼautant plus généreux à la Société de ne mʼen avoir pas moins élu – je viens de lui écrire une lettre des plus obligeantes, ainsi quʼune longue depêche à Colebrooke. Tâchez de le rencontrer, soit en Ecosse, où il va à la fin dʼAoût pour peu de temps, soit à votre retour à Londres.
Vous seriez bien bon si vous vouliez emporter le numéro du Journal Asiatique, et me lʼenvoyer de Paris sous bandes. Nous lʼavons ici, mais nous sommes encore bien loin du Juillet.
Cette collection de peintures Indiennes que vous mʼavez procurée, cʼest superbe, et au delà de toutes mes espérances. Vous pourrez mʼenvoyer cela de Paris par la diligence, chargé sʼentend, et emballé dans de la toile cirée triple. Je mʼen rejouis comme un enfant, et je mʼen vais faire une belle lettre à Sir Alex.[andre] Johnston, et lui envoyer toutes mes productions orientales.
Mon imprimerie est en pleine activité et va à merveille. Je compose moi-même avec une patience imperturbable, et jʼaurai bientôt achevé le Bhagavad-Gîtâ. Je ne me donne pas le temps de respirer. Cet été jʼai donné un cours public en Latin – seulement une leçon par semaine, mais cela mʼa coûté beaucoup de travail pour le fond et pour la forme. Voici les vacances pendant lesquelles jʼavancerai ma bibliothèque Indienne. Jʼai enfin trouvé un écolier qui, sʼil continue comme il a commencé pourra dans la suite mʼêtre dʼun grand secours, pour les détails du travail grammatical et proprement philologique.
Me voilà entierement fixé à Bonn. Le ministère mʼinvita dernierement à me décider – il a agréé les motifs qui me font préférer ce séjour à celui de Berlin, et je mʼen félicite de tout mon cœur. Jʼen serai plus voisin de la chère famille, et jʼaurai lʼespérance de vous revoir de temps à autre.
Votre admirable sœur mʼa écrit de Coppet – elle se plaignoit de maux dʼoreilles très penibles. Depuis elle mʼa laissé sans nouvelles, je mʼen inquiète, et je donnerois beaucoup pour la savoir parfaitement retablie.
Jʼaurois été enchanté de voir Madame de Ste. Aulaire; je me serois mis en quatre pour lʼengager à passer quelques jours dans ce pays délicieux – mais jʼen ai perdu tout espoir puisque je vois que M. de Ste Aul.[aire] est de retour à Paris, et quʼil a fait le 7 un discours à la chambre.
Depuis quelques jours ma nièce, Madame de Buttlar est chez moi avec son mari. Elle passera ici, je pense, le mois de Septembre, ensuite elle ira à Paris, où je lʼaiderai de tous mes moyens. Je compte bien sur votre bon accueil. Cʼest une petite personne dʼun caractère infiniment doux et aimable et pleine de talent.
Jʼai reçu lʼouvrage de Drake, mais il nʼest pas juste que je doive payer 135 francs pour un livre dans lequel on me nomme the ingenious, the eloquent, the admirable Schl[egel]. Si je ne peux pas obtenir des éloges gratis, je suis un homme ruiné.
Quand vous verrez S.[ir] J. Mackintosh, dites lui mille choses de ma part. Je mʼen vais lui écrire.
Adieu cher et admirable ami – mille et mille tendres amitiés.
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Bonn 12 Août 1822
Vous étes divin et adorable, mon cher Auguste – vous ajoutez en ma faveur un treizieme aux douze travaux dʼHercule. Je vous demande un million de pardons dʼavoir tardé si long-temps à répondre à votre première lettre. Jʼai été abimé de travail et pendant quinze jours je me suis porté passablement mal, de sorte que jʼai été tout découragé et que jʼai fait beaucoup de reflexions sur la briéveté de la vie humaine. Ce nʼétoit rien de nouveau – cependant jʼai un ennemi intérieur, dont la force vitale tâche de se debarasser, et qui semble renaître comme lʼhydre. Mon medecin se moque de mes appréhensions, et moi même, je nʼy pense plus, dès que je suis remis sur pied, et que je puis me livrer à lʼactivité intellectuelle.
Je reçois aujourdʼhui votre lettre de Lambton. Il y a quelques jours quʼil mʼen est arrivé une de Colebrooke, laquelle mʼannonce que la Société de Calcutta mʼa élu Honorary member, ce qui mʼest infiniment agréable. Je ne lʼavois espéré que dans deux ans dʼici. Colebrooke me parle aussi des observations quʼon a opposées à mes critiques, et quʼil veut me communiquer. Le fait est que jʼai écrit mes vues générales sur lʼétat actuel de la philologie Indienne sans me gêner et sans avoir la pensée que jamais cela pût être lû dans lʼInde; je me suis servi par ci par là de formes assez acerbes. Lorsque jʼai envoyé ma Bibliothèque Indienne à Colebrooke je lui ai dit: Voyez si vous voulez envoyer cela à Calcutta, je vous en fais juge, il y a des choses là-dedans qui doivent déplaire à plusieurs personnes en Asie. Il mʼa répondu, que je ne devois me faire aucun scrupule, que dans les recherches savantes il falloit admettre la discussion la plus franche. Les critiques de loin sont toujours plus vivement ressenties que de près – jʼen ai fait lʼexpérience, il y a nombre dʼannées, lorsque jʼeus passé en revue dans une lettre à Goethe Canova et les autres artistes de Rome. Il est dʼautant plus généreux à la Société de ne mʼen avoir pas moins élu – je viens de lui écrire une lettre des plus obligeantes, ainsi quʼune longue depêche à Colebrooke. Tâchez de le rencontrer, soit en Ecosse, où il va à la fin dʼAoût pour peu de temps, soit à votre retour à Londres.
Vous seriez bien bon si vous vouliez emporter le numéro du Journal Asiatique, et me lʼenvoyer de Paris sous bandes. Nous lʼavons ici, mais nous sommes encore bien loin du Juillet.
Cette collection de peintures Indiennes que vous mʼavez procurée, cʼest superbe, et au delà de toutes mes espérances. Vous pourrez mʼenvoyer cela de Paris par la diligence, chargé sʼentend, et emballé dans de la toile cirée triple. Je mʼen rejouis comme un enfant, et je mʼen vais faire une belle lettre à Sir Alex.[andre] Johnston, et lui envoyer toutes mes productions orientales.
Mon imprimerie est en pleine activité et va à merveille. Je compose moi-même avec une patience imperturbable, et jʼaurai bientôt achevé le Bhagavad-Gîtâ. Je ne me donne pas le temps de respirer. Cet été jʼai donné un cours public en Latin – seulement une leçon par semaine, mais cela mʼa coûté beaucoup de travail pour le fond et pour la forme. Voici les vacances pendant lesquelles jʼavancerai ma bibliothèque Indienne. Jʼai enfin trouvé un écolier qui, sʼil continue comme il a commencé pourra dans la suite mʼêtre dʼun grand secours, pour les détails du travail grammatical et proprement philologique.
Me voilà entierement fixé à Bonn. Le ministère mʼinvita dernierement à me décider – il a agréé les motifs qui me font préférer ce séjour à celui de Berlin, et je mʼen félicite de tout mon cœur. Jʼen serai plus voisin de la chère famille, et jʼaurai lʼespérance de vous revoir de temps à autre.
Votre admirable sœur mʼa écrit de Coppet – elle se plaignoit de maux dʼoreilles très penibles. Depuis elle mʼa laissé sans nouvelles, je mʼen inquiète, et je donnerois beaucoup pour la savoir parfaitement retablie.
Jʼaurois été enchanté de voir Madame de Ste. Aulaire; je me serois mis en quatre pour lʼengager à passer quelques jours dans ce pays délicieux – mais jʼen ai perdu tout espoir puisque je vois que M. de Ste Aul.[aire] est de retour à Paris, et quʼil a fait le 7 un discours à la chambre.
Depuis quelques jours ma nièce, Madame de Buttlar est chez moi avec son mari. Elle passera ici, je pense, le mois de Septembre, ensuite elle ira à Paris, où je lʼaiderai de tous mes moyens. Je compte bien sur votre bon accueil. Cʼest une petite personne dʼun caractère infiniment doux et aimable et pleine de talent.
Jʼai reçu lʼouvrage de Drake, mais il nʼest pas juste que je doive payer 135 francs pour un livre dans lequel on me nomme the ingenious, the eloquent, the admirable Schl[egel]. Si je ne peux pas obtenir des éloges gratis, je suis un homme ruiné.
Quand vous verrez S.[ir] J. Mackintosh, dites lui mille choses de ma part. Je mʼen vais lui écrire.
Adieu cher et admirable ami – mille et mille tendres amitiés.
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