• Herr di Fiore to August Wilhelm von Schlegel

  • Place of Dispatch: Dijon · Place of Destination: Coppet · Date: 15.05.1807
Edition Status: Newly transcribed and labelled; double collated
    Metadata Concerning Header
  • Sender: Herr di Fiore
  • Recipient: August Wilhelm von Schlegel
  • Place of Dispatch: Dijon
  • Place of Destination: Coppet
  • Date: 15.05.1807
    Manuscript
  • Provider: Sächsische Landesbibliothek - Staats- und Universitätsbibliothek Dresden
  • OAI Id: APP2712-Bd-6
  • Classification Number: Mscr.Dresd.App.2712,B,21,35
  • Number of Pages: 3 S. auf Doppelbl., hs. m. Paraphe u. Adresse
  • Format: 23 x 19,4 cm
  • Incipit: „[1] Monsieur = Votre lettre du 29 Avril ne m’est arrivée que avant-hier - Comment vous dire ce que j’ai [...]“
    Language
  • French
    Editors
  • Förtig, Christina
  • Varwig, Olivia
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[1] Monsieur = Votre lettre du 29 Avril ne m’est arrivée que avant-hier - Comment vous dire ce que j’ai eprouvé en la lisant? Incomparable femme, au milieu de ses peines elle se souvient encore de moi, et comme la Divinité elle ne me parle que par ses soins genereux! Si je pouvois au moins lui faire lire dans mon cœur! elle y verroit a quels traits de feu y sont gravés ses bienfaits et ma reconnoissance!
Je n’ecrirai pas au
G. Ecuyer de S. M. le Roi de Naples. Ne sachant pas si je dois lui nommer la personne qui m’a recommandé j’aime mieux eloigner une esperance, que commettre une indiscretion. D’ailleurs il est actuellement en Hollande pour y negocier un emprunt. J’en tiens la nouvelle de Mr Riouffe qui ne casse de me temoigner le desir de m’être utile et qui avoit ecrit à Mr de Bretagne (du 10 au 20 Avril je crois) pour l’engager a parler de moi a Mr Girardin et lui remettre un memoire sur mon affaire. Il vient de recevoir la reponse la plus obbligeante, a ce qu’il m a dit, dans laquelle on l’assure qu’on s’interessera à moi
J’attendrai donc, d’autant plus que je suis sans aucune inquietude sur la presque ressemblance de mon nom avec celui du
fusillé, n’ayant rien, absolument rien de commun avec lui. Il s’appelle Fiori, et moi di Fiore, il est Calabrois a ce que les Gazettes ont dit, et moi je suis né a quatre lieues de Naples en Province de Terre de Labour, et qu’enfin je suis aussi connu par mes principes liberaux et mon attachement à la France, que l’autre l’etoit par sa haine. Si cependant vous croyez qu’il soit absolument necessaire de donner ces eclaircissemens, alors je pourrai les faire passer par le moyen de Mr Riouffe en lui cachant ou en lui disant la raison qui m’y determine, d’apres vos ordres.
Le nom de
Mr Riouffe que j’ecris pour la seconde fois me donne le desir de vous marquer une partie de ce qu’il me disoit hier. Il arrivoit de la Campagne où il m’engageoit à aller le voir. Un des moyens d’amusement qu’il me promettoit étoit de me faire lire Corinna dont il est [2] enchanté. Cedant à l’ascendant irresistible qu’exerce l’auteur sur tous ceux qui lisent l’ouvrage sans prevention et qui ont encore une ame, il me disoit qu’il en etoit ravi, emu, mais qu’il n’avoit pû se defendre d’un sentiment de peine. Que tout le livre etoit empreint de douleur, ce que lui fesoit croire que celle qui l’avoit ecrit souffroit plus qu’on ne le pensoit, et qu’il paroissoit que son existence etoit empoisonnée et son ame brisée. Cela est d’autant plus cruel, il a continué, qu’elle ne le merite sous aucun rapport Autrefois elle avoit de l’amitié pour moi, mais a present c’est fini. Quand je pense aux raisons qui ont pû etre la cause d’un tel changement, je n’en trouve pas d’autres qu’un mot que je me suis permis sur le mal que son imagination auroit pû faire, qu’on lui a rapporté peut-etre en l’enveminant, mais il n’y a pas d’homme qui plus que moi sache lui rendre justice. J’admire ses talens, je respecte ses vertus, et si j’etois sûr de lui faire plaisir je prendrais la poste pour aller faire ma paix avec elle. Je n’ose pas vous ecrire ce qu’il a ajouté encore, mais je peux vous assurer qu’en l’observant attentivement je n’ai rien remarqué en lui qui puisse faire douter de ce qu’il disoit.
Adieu Monsieur vous ne m’avez pas dit un mot un seul mot de la situation presente de
celle que je n’ose pas comme vous appeler notre amie, mais elle doit être douloureuse et l’image que je m’en fais me fait bien du mal. Si elle pouvoit etre au dessus de l’espace humaine par le courage, comm’elle l’est par tout le reste! Qu’il seroit digne d’elle de depouiller les hommes de leur pouvoir en devenant indifferente à l’abus qu’ils en font.
Pour vous je ne connois de meilleure reponse a faire aux sentimens
[3] obbligeans que vous me temoignez que de tâcher de les meriter, et de vous rendre ceux qui vous sont dûs
F.
Dijon 15 Mai 1807
Rue des forges
à
Dijon
[4] A Monsieur
Monsieur Schlegel
Chez
Mr Hentsches Banquier
chez
Madame la Baronne
Necker Staël de Holstein

à
Geneve Copet
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[1] Monsieur = Votre lettre du 29 Avril ne m’est arrivée que avant-hier - Comment vous dire ce que j’ai eprouvé en la lisant? Incomparable femme, au milieu de ses peines elle se souvient encore de moi, et comme la Divinité elle ne me parle que par ses soins genereux! Si je pouvois au moins lui faire lire dans mon cœur! elle y verroit a quels traits de feu y sont gravés ses bienfaits et ma reconnoissance!
Je n’ecrirai pas au
G. Ecuyer de S. M. le Roi de Naples. Ne sachant pas si je dois lui nommer la personne qui m’a recommandé j’aime mieux eloigner une esperance, que commettre une indiscretion. D’ailleurs il est actuellement en Hollande pour y negocier un emprunt. J’en tiens la nouvelle de Mr Riouffe qui ne casse de me temoigner le desir de m’être utile et qui avoit ecrit à Mr de Bretagne (du 10 au 20 Avril je crois) pour l’engager a parler de moi a Mr Girardin et lui remettre un memoire sur mon affaire. Il vient de recevoir la reponse la plus obbligeante, a ce qu’il m a dit, dans laquelle on l’assure qu’on s’interessera à moi
J’attendrai donc, d’autant plus que je suis sans aucune inquietude sur la presque ressemblance de mon nom avec celui du
fusillé, n’ayant rien, absolument rien de commun avec lui. Il s’appelle Fiori, et moi di Fiore, il est Calabrois a ce que les Gazettes ont dit, et moi je suis né a quatre lieues de Naples en Province de Terre de Labour, et qu’enfin je suis aussi connu par mes principes liberaux et mon attachement à la France, que l’autre l’etoit par sa haine. Si cependant vous croyez qu’il soit absolument necessaire de donner ces eclaircissemens, alors je pourrai les faire passer par le moyen de Mr Riouffe en lui cachant ou en lui disant la raison qui m’y determine, d’apres vos ordres.
Le nom de
Mr Riouffe que j’ecris pour la seconde fois me donne le desir de vous marquer une partie de ce qu’il me disoit hier. Il arrivoit de la Campagne où il m’engageoit à aller le voir. Un des moyens d’amusement qu’il me promettoit étoit de me faire lire Corinna dont il est [2] enchanté. Cedant à l’ascendant irresistible qu’exerce l’auteur sur tous ceux qui lisent l’ouvrage sans prevention et qui ont encore une ame, il me disoit qu’il en etoit ravi, emu, mais qu’il n’avoit pû se defendre d’un sentiment de peine. Que tout le livre etoit empreint de douleur, ce que lui fesoit croire que celle qui l’avoit ecrit souffroit plus qu’on ne le pensoit, et qu’il paroissoit que son existence etoit empoisonnée et son ame brisée. Cela est d’autant plus cruel, il a continué, qu’elle ne le merite sous aucun rapport Autrefois elle avoit de l’amitié pour moi, mais a present c’est fini. Quand je pense aux raisons qui ont pû etre la cause d’un tel changement, je n’en trouve pas d’autres qu’un mot que je me suis permis sur le mal que son imagination auroit pû faire, qu’on lui a rapporté peut-etre en l’enveminant, mais il n’y a pas d’homme qui plus que moi sache lui rendre justice. J’admire ses talens, je respecte ses vertus, et si j’etois sûr de lui faire plaisir je prendrais la poste pour aller faire ma paix avec elle. Je n’ose pas vous ecrire ce qu’il a ajouté encore, mais je peux vous assurer qu’en l’observant attentivement je n’ai rien remarqué en lui qui puisse faire douter de ce qu’il disoit.
Adieu Monsieur vous ne m’avez pas dit un mot un seul mot de la situation presente de
celle que je n’ose pas comme vous appeler notre amie, mais elle doit être douloureuse et l’image que je m’en fais me fait bien du mal. Si elle pouvoit etre au dessus de l’espace humaine par le courage, comm’elle l’est par tout le reste! Qu’il seroit digne d’elle de depouiller les hommes de leur pouvoir en devenant indifferente à l’abus qu’ils en font.
Pour vous je ne connois de meilleure reponse a faire aux sentimens
[3] obbligeans que vous me temoignez que de tâcher de les meriter, et de vous rendre ceux qui vous sont dûs
F.
Dijon 15 Mai 1807
Rue des forges
à
Dijon
[4] A Monsieur
Monsieur Schlegel
Chez
Mr Hentsches Banquier
chez
Madame la Baronne
Necker Staël de Holstein

à
Geneve Copet
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