Monsieur et tres savant ami, Mr. Schultz m’a communiqué votre petite note relative à trois passages du gîtâ dont vous desiriez la collation. je l’ai faite sur tous nos manuscrits qui sont parfaitement d’accord avec le texte de Calcutta. il est remarquable que les trois passages qui vous font quelque peine sont précisement ceux qui vous m’ont egalement arrêté quelque tems dans le cours de l’explication que j’ai faite l’année derniere du gîtâ.
je suis cependant venu aisement à bout du 1er (lecon IV. sl. 2) dans le quel j’ai consideré paraṃparā comme un adverbe composé ayant la signification de successivement, par succession, par transmission. voy. dans wilson les mots paraḥ param ind. et. parā ind.
Le second passage (lect. XVIII vers. ult.) m’a donné un peu plus de peine, mais je n’ai pas tardé à reconnoître que la difficulté reposoit sur l’ellipse du mot iti voici, virtuellement compris entre nītiḥ et matiḥ (voici mon opinion).
quant au 3eme (lect. III. sl. 10) c’est en vain que j’ai cherché à ramener le mot pramaviṣyadhvaṃ à une forme grammaticale correcte. Ce mot en effet par sa desinence sembleroit devoir appartenir au mode conditionnel, mais alors il devroit prendre l’augment a et etre ecrit prāmāvaṣyadhvaṃ. j’en ai fait la remarque à mes eleves il y a à peu près un an en leur donnant à entendre que je considerois cette anomalie comme une licence dont on pourroit peut-être trouver des exemples dans le Dialecte des [2] védas: et en verité je tiens encore à cette opinion, le conditionnel pouvant faire ici un tres bon sens. Le commentaire explique ce mot par l’imperatif pur et simple du même verbe mū à la 4eme Conj. pramūyadhvaṃ c. a. d. prosperez, sans donner aucun eclaircissement sur la forme obsolete du mot employé dans le texte.
Je desire que vous formiez une meilleure conjecture. je vois par le doute de votre part quel soin vous avez mis à la lecture du gîtâ dont nous attendons impatiemment l’apparition. quant à moi je suis toujours dans le nirvanam et je sens malheureusemt que quelque mauvais genie m’y plonge de plus en plus. tout ce que je puis faire, c’est d’expliquer à mes élèves d’une maniere passable les lois de Menou qui par ci par là me donnent beaucoup à travailler. je vous remercie infiniment de votre 4eme cahier qui par l’intérêt des matierres repond en tout à ses ainés: seulement il me semble que la dissertation de Mr de Humboldt sur les desinences tvā et ya est un peu diffuse et longuette. que deviendrions nous, bon Dieu! si toutes les parties de la gram. Sansk. devoient être ainsi traitées. le vrai talent en fait d’ouvrages de cette nature est, sous une forme abregée, de concentrer toute la substance du langage; et ce talent, vous nous ferez voir un jour que vous le possedez admirablement.
Adieu aimez moi et plaignez moi
Chezy
paris 26 avril 1823.
[3] [leer]
[4] Prusse
A Monsieur
Monsieur. W. de Schlegel
professeur à Bonn.
Bonn