[1] Il y a un siecle que je suis sans nouvelles de vous cher ami c’est ma faute, ou pour mieux dire pas ma faute, car si je ne vous ai pas écrit, c’est que j’ai été souffrante tout l’été. J’ai eu continuellement des maux de yeux et de dents. Ce n’est qu’à present que je commence à me remettre un peu. Dites moi donc comment vous allez. Vos dernières lettres avoient une teinte toute triste qui m’a fort affligée. Helas ce [2] n’est pas moi qui puis beaucoup vous égayer. J’ai encore eu un chagrin. Cette jeune Angloise qui étoit la compagne de Pauline a été enlevée comme elle bien rapidement, mais aussi dans la paix de Dieu. Elle a vu la mort non seulement avec la paix, mais avec joie, elle voyoit notre Sauveur qui lui tendoit les bras et l’appelloit dans sa lumière. Mlle Randall est toute souffrante elle a des maux d’estomac qui ne finissent pas. Tout cela [3] est sombre cher ami, mais il y a une brillante lumière sur l’autre bord qui nous appelle oh puissions nous la suivre comme les sages suivoient l’étoile divine.
Victor et mes deux enfans sont bien graces à Dieu. Albert va [a]ller au college comme co[llegien] il en a besoin, il commence [à] se dissiper un peu et son attention n’est pas assez forte. Je suis à la campagne près de Paris et j’y resterai jusqu’au mois d’Octobre. Quels sont vos plans? [4] Quand nous reverrons nous?
Adieu bien cher ami Mr Doudan vous dit mille choses il travaille tout le jour mais pas à la metaphysique quand en ferons nous ensemble? Vous savez si je vous aime tendrement.
7 Septembre St. Broglie
Monsieur
A. W. de Schlegel
Chevalier de plusieurs ordres etc.
à Bonn
Province Prussienne du Rhin