• Anne Louise Germaine de Staël-Holstein to August Wilhelm von Schlegel

  • Place of Dispatch: London · Place of Destination: Unknown · Date: 09.11.1813
Edition Status: Single collated printed full text without registry labelling not including a registry
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    Metadata Concerning Header
  • Sender: Anne Louise Germaine de Staël-Holstein
  • Recipient: August Wilhelm von Schlegel
  • Place of Dispatch: London
  • Place of Destination: Unknown
  • Date: 09.11.1813
    Printed Text
  • Provider: Sächsische Landesbibliothek - Staats- und Universitätsbibliothek Dresden
  • OAI Id: 363310770
  • Bibliography: Lettres inédites de Mme de Staël à Henri Meister. Hg. v. Paul Usteri, Eugène Ritter. Paris 1903, S. 267‒269.
  • Weitere Drucke: Pange, Pauline de: Auguste-Guillaume Schlegel et Madame de Staël d’apres des documents inédits. Paris 1938, S. 469‒470.
  • Incipit: „Londres, ce 9 novembre [1813].
    Il y a à présent deux mois que je n’ai pas une ligne de vous: cela est [...]“
    Manuscript
  • Provider: Sächsische Landesbibliothek - Staats- und Universitätsbibliothek Dresden
  • OAI Id: DE-611-36979
  • Classification Number: Mscr.Dresd.e.90,XIX,Bd.26,Nr.9
  • Number of Pages: 4 S. auf Doppelbl., hs.
  • Format: 22,8 x 18,4 cm
Londres, ce 9 novembre [1813].
Il y a à présent deux mois que je n’ai pas une ligne de vous: cela est amer. Je n’aurais pas cru que vous puissiez vous conduire ainsi, que me sachant malheureuse, vous puissiez jeter un tel poison dans mon cœur. Ici, tout le monde reçoit des lettres de ses amis du quartier général; les plus occupés trouvent le temps d’écrire; moi seule, je n’ai rien de mon intime ami, de celui que j’ai placé loin de moi, sacrifiant mon intérêt au sien, mais me flattant néanmoins qu’il me saurait à jamais gré de m’être comptée pour rien en me séparant de lui. Ce n’est pas tout encore: votre petit billet à mon fils ne prouve que trop que vous n’avez point entretenu la bienveillance du Prince royal pour nous. Vous me l’aviez pourtant promis, et la reconnaissance qui est dans votre caractère, ne devrait-elle pas vous rappeler que c’était par moi que votre glorieuse connexion avec lui s’était formée? La prospérité doit-elle changer un cœur tel que le vôtre, et ne sentez-vous pas que votre oubli me navre l’âme? Il n’arrive pas une malle qui ne me coûte des nuits sans sommeil. Je suis humiliée aux yeux des autres, quand on me dit: "Hé bien! avez-vous des nouvelles de M. Schlegel?" Je suis déchirée dans la solitude par la perte de ma confiance en votre amitié, qui était mon plus grand trésor dans ce monde. Mon fils et ma fille ont aussi le cœur serré de votre indifférence pour nous tous; nous ne parlons pas ensemble d’autre chose; depuis la perte de mon pauvre fils, je n’ai pas éprouvé un chagrin plus amer. Ces deux malheurs se mêlent: je me dis que s’il était là, je ne serais pas oubliée par vous, ni par le Prince; j’aurais des lettres du Continent; la cause pour laquelle je donnerais ma vie, ne se gagnerait pas sans qu’un ami m’en félicitât. Ah! si vous aviez besoin de moi comme j’ai besoin de vous, vous abandonnerais-je ainsi? Vous ai-je abandonné à Stockholm, et ma prospérité, si j’en avais, ne serait-elle pas la vôtre?
J’ai publié ce livre où tout vous rappelle à moi; l’édition a été enlevée en trois jours; mais que m’importe? à qui en parler? Vous avez bien fait d’être mal pour moi, les derniers temps de notre séjour ensemble; jamais sans cela je n’aurais pu vous quitter. J’ai tant perdu en vous perdant! Si je vous retrouvais jamais, je ferais tant pour vous retenir! Je suis abîmée de spleen, quoiqu’on soit très bon pour moi, et c’est votre silence qui en est la cause. M. de Wetterstedt ne traite pas ainsi sa femme; et ne suis-je pas, quoi que vous en disiez, la personne du monde qui s’intéresse le plus à vous? ma maison n’est-elle pas la vôtre? ma famille, vos enfants? Ah! que vous me faites de mal par ce silence! Je vous pardonnerais cependant, si vous reveniez chez moi.
Pouvez-vous soutenir cette guerre? Je passe de l’irritation à l’inquiétude; de grâce, ne laissez pas passer un courrier sans quelques lignes, et croyez qu’en me détruisant, c’est votre propriété que vous prodiguez.
Adieu; ma santé est toujours mauvaise. Vous me regretterez un jour.
Londres, ce 9 novembre [1813].
Il y a à présent deux mois que je n’ai pas une ligne de vous: cela est amer. Je n’aurais pas cru que vous puissiez vous conduire ainsi, que me sachant malheureuse, vous puissiez jeter un tel poison dans mon cœur. Ici, tout le monde reçoit des lettres de ses amis du quartier général; les plus occupés trouvent le temps d’écrire; moi seule, je n’ai rien de mon intime ami, de celui que j’ai placé loin de moi, sacrifiant mon intérêt au sien, mais me flattant néanmoins qu’il me saurait à jamais gré de m’être comptée pour rien en me séparant de lui. Ce n’est pas tout encore: votre petit billet à mon fils ne prouve que trop que vous n’avez point entretenu la bienveillance du Prince royal pour nous. Vous me l’aviez pourtant promis, et la reconnaissance qui est dans votre caractère, ne devrait-elle pas vous rappeler que c’était par moi que votre glorieuse connexion avec lui s’était formée? La prospérité doit-elle changer un cœur tel que le vôtre, et ne sentez-vous pas que votre oubli me navre l’âme? Il n’arrive pas une malle qui ne me coûte des nuits sans sommeil. Je suis humiliée aux yeux des autres, quand on me dit: "Hé bien! avez-vous des nouvelles de M. Schlegel?" Je suis déchirée dans la solitude par la perte de ma confiance en votre amitié, qui était mon plus grand trésor dans ce monde. Mon fils et ma fille ont aussi le cœur serré de votre indifférence pour nous tous; nous ne parlons pas ensemble d’autre chose; depuis la perte de mon pauvre fils, je n’ai pas éprouvé un chagrin plus amer. Ces deux malheurs se mêlent: je me dis que s’il était là, je ne serais pas oubliée par vous, ni par le Prince; j’aurais des lettres du Continent; la cause pour laquelle je donnerais ma vie, ne se gagnerait pas sans qu’un ami m’en félicitât. Ah! si vous aviez besoin de moi comme j’ai besoin de vous, vous abandonnerais-je ainsi? Vous ai-je abandonné à Stockholm, et ma prospérité, si j’en avais, ne serait-elle pas la vôtre?
J’ai publié ce livre où tout vous rappelle à moi; l’édition a été enlevée en trois jours; mais que m’importe? à qui en parler? Vous avez bien fait d’être mal pour moi, les derniers temps de notre séjour ensemble; jamais sans cela je n’aurais pu vous quitter. J’ai tant perdu en vous perdant! Si je vous retrouvais jamais, je ferais tant pour vous retenir! Je suis abîmée de spleen, quoiqu’on soit très bon pour moi, et c’est votre silence qui en est la cause. M. de Wetterstedt ne traite pas ainsi sa femme; et ne suis-je pas, quoi que vous en disiez, la personne du monde qui s’intéresse le plus à vous? ma maison n’est-elle pas la vôtre? ma famille, vos enfants? Ah! que vous me faites de mal par ce silence! Je vous pardonnerais cependant, si vous reveniez chez moi.
Pouvez-vous soutenir cette guerre? Je passe de l’irritation à l’inquiétude; de grâce, ne laissez pas passer un courrier sans quelques lignes, et croyez qu’en me détruisant, c’est votre propriété que vous prodiguez.
Adieu; ma santé est toujours mauvaise. Vous me regretterez un jour.
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