Cher ami, votre lettre me fait une grande peine je crains que vous nʼayez fait une étourderie mais au nom de Dieu nʼen faites pas une autre tout de suite après et la séparation en seroit une immense car precisement parceque la célebrité est toute de votre coté cʼest vous que lʼon accuseroit plutôt quʼune personne obscure. Un second divorce seroit infailliblement une chose qui feroit du tort à votre caractère eussiez vous mille fois raison. Il me semble donc bien essentiel que vous essayez toutes les manières de lʼéviter. Puisque cette personne vous plait sʼil est vrai quʼelle nʼait dʼautre tort que ceux de sa mère vous pourrez vous réconcilier. Si vous vous sépariez vous auriez dans peu de tems envie de vous remarier et songez vous même à lʼimpossibilité dʼun troisième mariage. Je ne comprends rien à la conduite de ces gens il faudroit être sur les lieux pour en juger jʼespère que vous nʼavez pris aucun engagement dʼargent qui puisse les satisfaire. Si cʼest simplement de lʼirritabilité maladive dans la mère et de la faiblesse dans la fille, il y a remede dʼautant plus que si la mère est malade cela excuse beaucoup la fille. Je ne puis croire que la fille vous ait épousé pour vouloir se séparer de vous deux mois après il y là ou un vilain calcul ou de la folie mais je ne vois pas trop où seroit lʼintéret. Si vous voulez que je vous dise vous nʼavez pas lʼair bien amoureux et la manière dont vous parlez dʼune séparation me donneroit lʼidée que vous êtiez déjà un peu dégouté dʼelle avant ses torts. Mais la seule chose sur la quelle jʼinsiste vis à vis de vous cʼest sur la nécessité dʼéviter un éclat et sur lʼerreur où vous êtez de croire que ce ne sont pas toujours les gens celebres que lʼon accuse. Je suis tourmentée de tout cela, je pressentois par votre silence quʼil y avoit quelque chose de triste. Je ne vous parle pas de votre autre lettre qui a beaucoup amusé tout le monde. Ce nʼest pas tant des poésies que je voudrois en fait dʼouvrages religieux que de la belle prose. Jʼaurais voulu quelque chose qui fut applicable à la France cʼest à dire ni trop rêveur ni trop dogmatique. Cela est assez difficile. Je mʼoccupe autant que je le puis à Paris mais à present cʼest lʼéducation qui est le rejet de mes études. Je ne vous parle pas de nouvelles parceque depuis le très heureux changement de notre ministère nous nʼavons plus de nouvelles que de prefets destitués et des fureurs des Ultras. Tenez moi au courant de vos affaires cher ami mais ne vous laissez pas trop aller à des gens qui voudroient vous entourer Dieu sait pourquoi – au moins à présent défiez vous des résolutions précipitées. Votre secret sera fidelement gardé – mille tendres amitiés. Mlle Rand.[all] partage tous mes sentiments et vous dit mille choses.
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Albertine Ida Gustavine de Broglie to August Wilhelm von Schlegel
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Place of Dispatch: Coppet GND · Place of Destination: Bonn GND · Date: 11.01.1819
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Metadata Concerning Header
- Sender: Albertine Ida Gustavine de Broglie
- Recipient: August Wilhelm von Schlegel
- Place of Dispatch: Coppet GND
- Place of Destination: Bonn GND
- Date: 11.01.1819
- Notations: Absende- und Empfangsort erschlossen.
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Printed Text
- Provider: Sächsische Landesbibliothek - Staats- und Universitätsbibliothek Dresden
- OAI Id: 343347008
- Bibliography: Briefe von und an August Wilhelm Schlegel. Gesammelt und erläutert durch Josef Körner. Bd. 1. Zürich u.a. 1930, S. 355‒356.
- Incipit: „[Coppet] 11 Janvier [1819]
Cher ami, votre lettre me fait une grande peine je crains que vous nʼayez fait une étourderie mais [...]“
[Coppet] 11 Janvier [1819]
Cher ami, votre lettre me fait une grande peine je crains que vous nʼayez fait une étourderie mais au nom de Dieu nʼen faites pas une autre tout de suite après et la séparation en seroit une immense car precisement parceque la célebrité est toute de votre coté cʼest vous que lʼon accuseroit plutôt quʼune personne obscure. Un second divorce seroit infailliblement une chose qui feroit du tort à votre caractère eussiez vous mille fois raison. Il me semble donc bien essentiel que vous essayez toutes les manières de lʼéviter. Puisque cette personne vous plait sʼil est vrai quʼelle nʼait dʼautre tort que ceux de sa mère vous pourrez vous réconcilier. Si vous vous sépariez vous auriez dans peu de tems envie de vous remarier et songez vous même à lʼimpossibilité dʼun troisième mariage. Je ne comprends rien à la conduite de ces gens il faudroit être sur les lieux pour en juger jʼespère que vous nʼavez pris aucun engagement dʼargent qui puisse les satisfaire. Si cʼest simplement de lʼirritabilité maladive dans la mère et de la faiblesse dans la fille, il y a remede dʼautant plus que si la mère est malade cela excuse beaucoup la fille. Je ne puis croire que la fille vous ait épousé pour vouloir se séparer de vous deux mois après il y là ou un vilain calcul ou de la folie mais je ne vois pas trop où seroit lʼintéret. Si vous voulez que je vous dise vous nʼavez pas lʼair bien amoureux et la manière dont vous parlez dʼune séparation me donneroit lʼidée que vous êtiez déjà un peu dégouté dʼelle avant ses torts. Mais la seule chose sur la quelle jʼinsiste vis à vis de vous cʼest sur la nécessité dʼéviter un éclat et sur lʼerreur où vous êtez de croire que ce ne sont pas toujours les gens celebres que lʼon accuse. Je suis tourmentée de tout cela, je pressentois par votre silence quʼil y avoit quelque chose de triste. Je ne vous parle pas de votre autre lettre qui a beaucoup amusé tout le monde. Ce nʼest pas tant des poésies que je voudrois en fait dʼouvrages religieux que de la belle prose. Jʼaurais voulu quelque chose qui fut applicable à la France cʼest à dire ni trop rêveur ni trop dogmatique. Cela est assez difficile. Je mʼoccupe autant que je le puis à Paris mais à present cʼest lʼéducation qui est le rejet de mes études. Je ne vous parle pas de nouvelles parceque depuis le très heureux changement de notre ministère nous nʼavons plus de nouvelles que de prefets destitués et des fureurs des Ultras. Tenez moi au courant de vos affaires cher ami mais ne vous laissez pas trop aller à des gens qui voudroient vous entourer Dieu sait pourquoi – au moins à présent défiez vous des résolutions précipitées. Votre secret sera fidelement gardé – mille tendres amitiés. Mlle Rand.[all] partage tous mes sentiments et vous dit mille choses.
Cher ami, votre lettre me fait une grande peine je crains que vous nʼayez fait une étourderie mais au nom de Dieu nʼen faites pas une autre tout de suite après et la séparation en seroit une immense car precisement parceque la célebrité est toute de votre coté cʼest vous que lʼon accuseroit plutôt quʼune personne obscure. Un second divorce seroit infailliblement une chose qui feroit du tort à votre caractère eussiez vous mille fois raison. Il me semble donc bien essentiel que vous essayez toutes les manières de lʼéviter. Puisque cette personne vous plait sʼil est vrai quʼelle nʼait dʼautre tort que ceux de sa mère vous pourrez vous réconcilier. Si vous vous sépariez vous auriez dans peu de tems envie de vous remarier et songez vous même à lʼimpossibilité dʼun troisième mariage. Je ne comprends rien à la conduite de ces gens il faudroit être sur les lieux pour en juger jʼespère que vous nʼavez pris aucun engagement dʼargent qui puisse les satisfaire. Si cʼest simplement de lʼirritabilité maladive dans la mère et de la faiblesse dans la fille, il y a remede dʼautant plus que si la mère est malade cela excuse beaucoup la fille. Je ne puis croire que la fille vous ait épousé pour vouloir se séparer de vous deux mois après il y là ou un vilain calcul ou de la folie mais je ne vois pas trop où seroit lʼintéret. Si vous voulez que je vous dise vous nʼavez pas lʼair bien amoureux et la manière dont vous parlez dʼune séparation me donneroit lʼidée que vous êtiez déjà un peu dégouté dʼelle avant ses torts. Mais la seule chose sur la quelle jʼinsiste vis à vis de vous cʼest sur la nécessité dʼéviter un éclat et sur lʼerreur où vous êtez de croire que ce ne sont pas toujours les gens celebres que lʼon accuse. Je suis tourmentée de tout cela, je pressentois par votre silence quʼil y avoit quelque chose de triste. Je ne vous parle pas de votre autre lettre qui a beaucoup amusé tout le monde. Ce nʼest pas tant des poésies que je voudrois en fait dʼouvrages religieux que de la belle prose. Jʼaurais voulu quelque chose qui fut applicable à la France cʼest à dire ni trop rêveur ni trop dogmatique. Cela est assez difficile. Je mʼoccupe autant que je le puis à Paris mais à present cʼest lʼéducation qui est le rejet de mes études. Je ne vous parle pas de nouvelles parceque depuis le très heureux changement de notre ministère nous nʼavons plus de nouvelles que de prefets destitués et des fureurs des Ultras. Tenez moi au courant de vos affaires cher ami mais ne vous laissez pas trop aller à des gens qui voudroient vous entourer Dieu sait pourquoi – au moins à présent défiez vous des résolutions précipitées. Votre secret sera fidelement gardé – mille tendres amitiés. Mlle Rand.[all] partage tous mes sentiments et vous dit mille choses.
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Index
Names
- Dessolle, Jean Joseph Paul Auguste ( , GND )
- Paulus, Caroline ( , GND , )
- Randall, Frances ( , GND , )
- Schlegel, Sophie von ( , GND , )