• Eugène Burnouf to August Wilhelm von Schlegel

  • Place of Dispatch: Paris · Place of Destination: Bonn · Date: 27.11.1834
Edition Status: Single collated printed full text without registry labelling not including a registry
    Metadata Concerning Header
  • Sender: Eugène Burnouf
  • Recipient: August Wilhelm von Schlegel
  • Place of Dispatch: Paris
  • Place of Destination: Bonn
  • Date: 27.11.1834
    Printed Text
  • Provider: Sächsische Landesbibliothek - Staats- und Universitätsbibliothek Dresden
  • OAI Id: 362738858
  • Bibliography: Burnouf, Eugène: Choix de lettres d’Eugène Burnouf 1825–1852. Suivi d’une bibliographie. Paris 1891, S. 465‒468.
  • Incipit: „[1] Paris, 27 novembre 1834.
    Monsieur,
    Je suis extrêmement sensible à lʼhonneur que vous mʼavez fait de mʼécrire, et je regarde comme une [...]“
    Manuscript
  • Provider: Sächsische Landesbibliothek - Staats- und Universitätsbibliothek Dresden
  • OAI Id: DE-611-38972
  • Classification Number: Mscr.Dresd.e.90,XIX,Bd.3,Nr.116
  • Number of Pages: 3 S. auf Doppelbl., hs. m. U. u. Adresse
  • Format: 24,6 x 18,2 cm
[1] Paris, 27 novembre 1834.
Monsieur,
Je suis extrêmement sensible à lʼhonneur que vous mʼavez fait de mʼécrire, et je regarde comme une marque, bien précieuse pour moi, de lʼintérêt que vous portez à mes travaux le soin que vous avez pris de me transcrire les paroles si honorables de M. Schelling. Évidemment, cet écrivain illustre tient plus compte aux travailleurs de leur bonne volonté que du succès, car, sʼil était indianiste, il nʼaurait pu quʼêtre extrêmement choqué dʼun grand nombre dʼerreurs réelles qui se trouvent dans ma première partie, sans parler dʼune foule dʼinattentions dont je suis honteux, et dont je ferai mon mea culpa devant le public. Pour ne parler que des plus choquantes, il faudra faire justice dʼune note sur us, inexacte dans sa plus grande partie, et de confusions erronées, comme âsa et âsît; djamyât, que jʼai pris pour un subjonctif de la deuxième classe, tandis que cʼest bien évidemment un précatif. Je vous dirai, entre nous, que M. Bopp est un peu cause de ces fautes, dont beaucoup viennent de précipitation. Sʼil ne sʼétait pas jeté à la traverse de mon travail, pour faire chanter ses découvertes par les recenseurs des Jahrbücher de Berlin, jʼaurais encore gardé un an mon livre, et, outre quʼil aurait gagné sous le rapport de la coordination des parties, qui y est à peu près nulle, et sous le rapport de la concision, qui y manque malheureusement, je crois pouvoir [2] dire que beaucoup dʼignorances, quelle quʼen soit la cause, en auraient disparu. Maintenant, le mal est fait; il sera toutefois réparable si des médecins comme vous veulent bien y apporter le remède de leurs conseils et de leurs avis que je ne perdrai jamais de vue.
Les nouvelles littéraires que vous vouiez bien me communiquer sont du plus haut intérêt. Quelle riche moisson que celle de M. Schilling de Canstadt! Faudra-t-il donc, pour aborder le bouddhisme, avaler, comme le Sage indien, les lacs sans fond du Bhôtânta? Cela est effrayant, seulement pour nous, qui sommes sur le seuil, marchant sous vos bannières; mais vous formerez tant et de si bons disciples que le travail divisé paraîtra plus abordable. Quelque intérêt que jʼattachasse à cette précieuse communication, je nʼai pas osé en rien laisser mettre dans le Journal asiatique, qui devient dʼailleurs, de jour en jour, plus brûlant des feux de la poésie arabe.
Dans lʼintervalle de la lettre dont vous mʼavez honoré et de celle que je vous écris dans ce moment, vous aurez dû recevoir le paquet complet de ce qui vous manque. Il était déposé chez Maze, auquel jʼavais recommandé de la célérité. Quant au Vendidad, je croyais vous avoir adressé le tout; mais, comme il nʼen est rien, dʼaprès les détails que vous me donnez, je vous ferai, de nouveau, lʼhommage de ce qui vous manque. Je vous demanderai [3] seulement quelque délai, parce que les banqueroutes de libraires, et même de lʼancienne liste civile, ont porté le trouble dans mes cent exemplaires, dont la mort de mon lithographe mʼempêche en ce moment de publier la dernière livraison.
Les nouvelles littéraires que jʼai à vous annoncer sont assez pauvres; il en est une cependant qui doit, dirai-je vous intéresser, tout au moins être connue de vous. M. Langlois, le chef des troupes de lʼopéra que vous aviez si heureusement caractérisées, vient de publier la plus grande partie dʼune traduction française du Harivamsa; sʼil ne vous lʼa pas envoyée, je crois que vous serez curieux dʼy jeter un coup dʼœil. En lui-même, le livre est rempli de légendes intéressantes, et il vaut bien la peine dʼêtre lu. Mais quel fond peut-on faire sur la traduction, quand on voit djyotisch purô gama traduit par qui marche devant la lumière, et quand un traducteur se vante, à cette occasion, dʼavoir rendu lʼoriginal littéralement! Il y a des fautes faisables, il y en a dʼinévitables; lʼattention nous échappe quelquefois, la mémoire aussi nous manque, parce que nous sommes hommes; mais il y a une limite à ces fautes, et dʼailleurs, en les supposant très nombreuses, on doit voir au travers, alentour, des traces dʼun savoir quelconque, dʼune exertion et dʼune volonté de bien faire qui rendent indulgents les plus difficiles; car, pour rabaisser un mot divin, „il sera beaucoup pardonné à celui qui aura beaucoup voulu.“ Je crains bien, pour le traducteur français du Harivamsa, que vous ne trouviez dans son œuvre que bien peu de qualités rédimantes, et jʼai grandʼpeur quʼil ne tombe sous votre justice sévère, de laquelle il ne se relèvera pas.
Mais je vois que jʼabuse de vos moments, et quʼil me reste à peine lʼespace suffisant pour vous prier dʼagréer mes hommages respectueux.
Votre très humble et très obéissant serviteur,
Eug. Burnouf.

P. S. – Seriez-vous assez bon pour présenter mes amitiés les plus cordiales à MM. Lassen et Windischmann?
[4]
[1] Paris, 27 novembre 1834.
Monsieur,
Je suis extrêmement sensible à lʼhonneur que vous mʼavez fait de mʼécrire, et je regarde comme une marque, bien précieuse pour moi, de lʼintérêt que vous portez à mes travaux le soin que vous avez pris de me transcrire les paroles si honorables de M. Schelling. Évidemment, cet écrivain illustre tient plus compte aux travailleurs de leur bonne volonté que du succès, car, sʼil était indianiste, il nʼaurait pu quʼêtre extrêmement choqué dʼun grand nombre dʼerreurs réelles qui se trouvent dans ma première partie, sans parler dʼune foule dʼinattentions dont je suis honteux, et dont je ferai mon mea culpa devant le public. Pour ne parler que des plus choquantes, il faudra faire justice dʼune note sur us, inexacte dans sa plus grande partie, et de confusions erronées, comme âsa et âsît; djamyât, que jʼai pris pour un subjonctif de la deuxième classe, tandis que cʼest bien évidemment un précatif. Je vous dirai, entre nous, que M. Bopp est un peu cause de ces fautes, dont beaucoup viennent de précipitation. Sʼil ne sʼétait pas jeté à la traverse de mon travail, pour faire chanter ses découvertes par les recenseurs des Jahrbücher de Berlin, jʼaurais encore gardé un an mon livre, et, outre quʼil aurait gagné sous le rapport de la coordination des parties, qui y est à peu près nulle, et sous le rapport de la concision, qui y manque malheureusement, je crois pouvoir [2] dire que beaucoup dʼignorances, quelle quʼen soit la cause, en auraient disparu. Maintenant, le mal est fait; il sera toutefois réparable si des médecins comme vous veulent bien y apporter le remède de leurs conseils et de leurs avis que je ne perdrai jamais de vue.
Les nouvelles littéraires que vous vouiez bien me communiquer sont du plus haut intérêt. Quelle riche moisson que celle de M. Schilling de Canstadt! Faudra-t-il donc, pour aborder le bouddhisme, avaler, comme le Sage indien, les lacs sans fond du Bhôtânta? Cela est effrayant, seulement pour nous, qui sommes sur le seuil, marchant sous vos bannières; mais vous formerez tant et de si bons disciples que le travail divisé paraîtra plus abordable. Quelque intérêt que jʼattachasse à cette précieuse communication, je nʼai pas osé en rien laisser mettre dans le Journal asiatique, qui devient dʼailleurs, de jour en jour, plus brûlant des feux de la poésie arabe.
Dans lʼintervalle de la lettre dont vous mʼavez honoré et de celle que je vous écris dans ce moment, vous aurez dû recevoir le paquet complet de ce qui vous manque. Il était déposé chez Maze, auquel jʼavais recommandé de la célérité. Quant au Vendidad, je croyais vous avoir adressé le tout; mais, comme il nʼen est rien, dʼaprès les détails que vous me donnez, je vous ferai, de nouveau, lʼhommage de ce qui vous manque. Je vous demanderai [3] seulement quelque délai, parce que les banqueroutes de libraires, et même de lʼancienne liste civile, ont porté le trouble dans mes cent exemplaires, dont la mort de mon lithographe mʼempêche en ce moment de publier la dernière livraison.
Les nouvelles littéraires que jʼai à vous annoncer sont assez pauvres; il en est une cependant qui doit, dirai-je vous intéresser, tout au moins être connue de vous. M. Langlois, le chef des troupes de lʼopéra que vous aviez si heureusement caractérisées, vient de publier la plus grande partie dʼune traduction française du Harivamsa; sʼil ne vous lʼa pas envoyée, je crois que vous serez curieux dʼy jeter un coup dʼœil. En lui-même, le livre est rempli de légendes intéressantes, et il vaut bien la peine dʼêtre lu. Mais quel fond peut-on faire sur la traduction, quand on voit djyotisch purô gama traduit par qui marche devant la lumière, et quand un traducteur se vante, à cette occasion, dʼavoir rendu lʼoriginal littéralement! Il y a des fautes faisables, il y en a dʼinévitables; lʼattention nous échappe quelquefois, la mémoire aussi nous manque, parce que nous sommes hommes; mais il y a une limite à ces fautes, et dʼailleurs, en les supposant très nombreuses, on doit voir au travers, alentour, des traces dʼun savoir quelconque, dʼune exertion et dʼune volonté de bien faire qui rendent indulgents les plus difficiles; car, pour rabaisser un mot divin, „il sera beaucoup pardonné à celui qui aura beaucoup voulu.“ Je crains bien, pour le traducteur français du Harivamsa, que vous ne trouviez dans son œuvre que bien peu de qualités rédimantes, et jʼai grandʼpeur quʼil ne tombe sous votre justice sévère, de laquelle il ne se relèvera pas.
Mais je vois que jʼabuse de vos moments, et quʼil me reste à peine lʼespace suffisant pour vous prier dʼagréer mes hommages respectueux.
Votre très humble et très obéissant serviteur,
Eug. Burnouf.

P. S. – Seriez-vous assez bon pour présenter mes amitiés les plus cordiales à MM. Lassen et Windischmann?
[4]
· Abschrift , 27.11.1834
· Bibliothèque nationale de France
· NAF 1060, ff 234recto-236recto
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