Monsieur,
Permettez-moi dʼintroduire à lʼhonneur de votre connaissance ma nièce, Mme de Buttlar, et son mari le baron de Buttlar, ancien colonel dans les gardes de lʼempereur de Russie. Ma nièce vient de passer quelques mois chez moi, et part pour Paris, afin dʼy cultiver son talent pour la peinture, dont elle a fait les premières études à Dresde et à Munich. Je lui ai conseillé ce voyage, et quand même Paris ne possèderait pas dʼimmenses richesses en fait dʼanciens tableaux et dʼexcellentes institutions pour lʼétude, jʼeusse trouvé un motif suffisant dans la facilité de voir, dʼadmirer et dʼétudier un plus grand nombre dʼouvrages du premier peintre vivant que ceux qui ornent les autres capitales de lʼEurope. Vous concevez, monsieur, avec quel tendre intérêt jʼaccompagne la fille unique dʼune sœur chérie. Cʼest un jeune talent qui demande à être encouragé et guidé. Vous mʼobligeriez infiniment si vous vouliez condescendre à voir ses essais et à lui faire vos observations.
Votre entretien aussi spirituel quʼinstructif, dont jʼeus le bonheur de jouir quelquefois, restera toujours pour moi lʼun des souvenirs les plus agréables de mon séjour à Paris.
Veuillez agréer, monsieur, lʼhommage de ma haute admiration et de ma considération la plus distinguée.
Votre très humble et très obéissant serviteur.
A.-W. de Schlegel.