Chère amie, en rentrant je trouve votre lettre du 25; j’aurais beaucoup de choses à répondre, mais il faut réserver pour la parole tout ce qui n’est pas un fait. Ceci est ma troisième lettre; il n’y a rien de nouveau: c’est le calme avant l’orage. Avant-hier on a parlé encore de négociations – il est certain qu'il n’y a ni commencement d’hostilité ni déclaration. La Suède, d’après les nouvelles de Stockholm du 20 mai, veut observer la plus stricte neutralité. En Russie M. de Romanzow, quoique frappé d’apoplexie, n’a pas quitté le Ministère et M. de Kotschoubey n’a pas pris le portefeuille, comme on l’avoit dit. J’ai beaucoup couru et cependant j’ai vu peu de personnes – lorsque vous y étiez on ne s’apercevoit pas de mes visites, depuis que vous êtes partie elles n’ont plus d’intérêt. Aug[uste], dans ses lettres, n’a pas l’air de se ressouvenir que je suis encore parmi les vivants, quoique je lui aye écrit quantité de fois – mais je suis blasé sur ce genre de choses.
Je saurois à l’instant tout ce qui se passe, mais jusqu’ici il n’y a rien. Je souhaite de vous rejoindre au plus vite. Mille adieux. L’enfant de Mad[ame] de Humboldt est décidément mieux.