J’ai l’honneur de présenter très humblement à Votre Altesse Royale un écrit, dont le principal ou peut-être le seul mérite est d’avoir été composé sous ses auspices. Les changements et retranchemens prescrits ont été faits soigneusement. J’ai eu du regret, je l’avoue, à un passage omis, qui était personnellement relatif à Votre Altesse Royale. Ce que j’avais écrit à cet égard n’était qu’une bien faible expression de mon admiration pour un puissant génie et un noble caractère, sur lesquels ce pays, sur lesquels l’humanité entière fonde de si belles et justes espérances. L’éblouissement produit par des succès obtenus aux dépens de la justice, de la bonne foi et de toute espèce de morale, a découragé les nations; l’enthousiasme pour la vraie grandeur peut seul leur rendre la confiance, et rallier leurs efforts pour se relever.
Personnellement je n’ai éprouvé qu’une petite part de l’oppression générale du Continent. On m’a banni de France : c’était un honneur non encore mérité. Cependant le rétablissement de ma patrie et de la liberté européenne absorbe toutes mes pensées; tous les moments qui n’y sont pas employés, me semblent perdus. C’est avec ces sentiments que j’ose offrir à Votre Altesse Royale un zèle et un dévouement sans bornes. Ayant toujours préféré l’indépendance et les loisirs littéraires aux emplois politiques, je ne crains pas que mon désir de servir Votre Altesse Royale puisse être mal interprété. C’est un devoir de se ranger sous les ordres de celui qui veut le bien et qui, grâce à la Providence, a les moyens de l’accomplir.
Je suis, avec le plus profond respect, Monseigneur, de Votre Altesse Royale, le très humble, très obéissant, et très dévoué serviteur
Schlegel.
Stockholm ce 2 mars 1813.