J’ai mille excuses à vous faire du retard de ma lettre et du second article que je voue avois promis. La cause en est uniquement que je mʼétois engagé par des promesses antérieures à fournir aussi des articles aux Annales littéraires de Heidelberg et à la Bibliothèque Universelle. Dans un des cahiers suivans de celle-ci vous trouverez mes remarques sur le dessin du groupe de Niobe par Cockerell.
Quoique le contenu de ma dernière lettre à vous ne fût que confidentiel, j’ai été enchanté de voir mon éloge de Mustoxidi inséré dans une note de votre journal. Il étoit très-juste aussi de consoler M. de Cicognara par les éloges dûs à son histoire de la sculpture moderne. Car s’il est fâcheux pour tout le monde de voir une opinion, quʼon a énoncée avec assurance, réfutée, et réfutée de manière à couper court à toute objection, cela est doublement fâcheux pour le président d’une Académie. Mais, pour le coup, n’allez pas insérer ceci dans une note.
Je pars pour Paris où je passerai l’hiver avec Madame de Staël. Je prends le livre de M. Graberg sur les Scandinaves avec moi, et je vous enverrai au plutôt de Paris mon article que je tâcherai le mieux que je pourrai de tirer hors de ténèbres de l’érudition, pour le rendre intéressant à nos contemporains. Puisque les Goths et les Langobardes ont attendu pendant mille ans quʼon parlât dignement d’eux, ils peuvent bien attendre encore un mois de plus.
Mille complimens à ce perfide Monti, qui ne parle point de mon Cours de littérature dramatique, quoiqu’il me l’eût promis. Ce livre vient d’être traduit en anglais et paroît trouver en Angleterre une réception favorable.
Je serai charmé d’avoir de vos nouvelles à Paris. Mon adresse y est Rue Royale n° 6.
Veuillez agréer, mon cher Acerbi, lʼexpression de mes sentimens les plus empressés.
Tout à vous
A. W. de Schlegel.
Coppet, 14 oct. 1816.
PS. Ce n’est qu’après avoir écrit cette lettre que j’apprends que M. Favre a changé de plan de voyage et qu’il ne passera à Milan qu’à son retour de Rome et de Naples. S’il a l’avantage de vous y trouver alors, je vous prie de le bien recevoir. En attendant, je vous envoyé ma lettre par la poste.