Je vous remercie affectueusement, mon cher ami, de votre excellente lettre. Trop de souvenirs chers nous tiennent unis, pour que nous puissions jamais être séparés, autrement que par l’âge et la distance des lieux. Moi aussi je commencerai bientôt à prendre racine quelque part, et à vivre uniquement dans le passé; mais avant que ce temps n’arrive, et pendant qu’il me reste encore quelques années d’activité possible, j’ai la ferme résolution d’aller vous revoir, et de m’entretenir encore une fois avec vous de tout ce que nous avons perdu. [2] J’ai passé ici avec mes enfants une grande portion de l’été; ma fille y est accouchée d’une fille; elle y était née il y a vingt et un an, sous de meilleurs auspices. maintenant je vais avec eux tous en Italie, où je ne suis plus retourné depuis l’époque de mon mariage; J’irai à Pise et je ne vous oublierai pas au milieu de tant de douloureux souvenirs. Puisque vous permettez à Albert de vous interrompre quelquefois dans votre solitude, il en profitera avec empressement; il a effectivement fini ses études cette année, et commencera le droit l’hyver prochain; j’espére vous le mener d’ici à un an ou deux, et le recommander à votre amitié. Conservez la lui, et conservez moi votre souvenir; [3] j’ai parlé de vos offres à M. Doudan; il vous écrira pour accepter, mais je ne le laisserai pas aller sans moi, et il faudra que vous nous receviez tous les deux.
Vôtre affectionné
V. Broglie
[4] [leer]